« Traitement de l’endométriose: pour une meilleure approche ». La chirurgie d’exérèse selon le Dr David Redwine

Dans la catégorie « endométriose » du blog Pharmacritique, je traduis et publie des textes du Dr David Redwine depuis 2011. Avec son aimable permission. Je fais connaître ses conceptions depuis le début de mes activités, en 2002-2003, et n’ai jamais diffusé les diverses mystifications omniprésentes. Jamais alimenté l’industrie de l’endométriose, non plus. Sur ce sujet comme sur les autres traités sur Pharmacritique, j’ai toujours appliqué mes impératifs: apporter l’information en français aussi, la donner en libre accès, donner des outils de compréhension pour l’empowerment et le choix éclairé de chacun. Mais aussi mener des campagnes contre les positions théoriques des organisations et leaders d’opinion et leurs pratiques préjudiciables pour les malades.

Après mon coup de gueule en guise d’introduction, vous trouverez la traduction d’un autre texte du Dr David Redwine, intitulé « Traitement de l’endométriose: pour une meilleure approche ».

Ce chirurgien états-unien de réputation internationale, que je présente en détail dans plusieurs textes, est aussi un pionnier de la description correcte de l’endométriose, particulièrement sur les formes dites « atypiques » qui sont pourtant majoritaires. Faute de connaissances, les chirurgiens ne les identifient pas comme étant de l’endométriose; ils les laissent donc en place, ce qui explique une bonne partie des douleurs.

Beaucoup de lésions sont ignorées. D’autres sont opérées de façon incomplète, par exérèse partielle ou ablation, et faites sous traitement pré-opératoire, généralement par un agoniste de la GnRH tel que le Decapeptyl ou Enantone / Lupron, ce qui diminue encore les chances de voir toutes les lésions et toute l’étendue de chacune. Quand les douleurs et autres symptômes persistent et que d’autres apparaissent (douleurs neuropathiques dues à la lésion d’un nerf, à sa compression par fibrose…), il ne s’agit donc pas de foyers d’endométriose de novo ni de « récidives » qui seraient dues à un retour de l’endométriose à cause des règles rétrogrades ou de progression ou de « métastases », etc. Il s’agit de continuation / persistance de l’endométriose non éradiquée (sur ces sujets aussi, lire les explications détaillées et les liens et références dans mon livre en libre accès).

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Conception et traitement de l’endométriose selon les deux positions opposées : Dr Jean Belaisch versus Dr David Redwine

Chaque théorie sur l’origine de l’endométriose entraîne une prise en charge différente. Un chirurgien qui pense et applique les mystifications habituelles – que l’endométriose serait chronique, due aux règles, à un système immunitaire défaillant, à une invasion inéluctable et à une prolifération comme un cancer (par « métastases » (!)) – prescrira des médicaments et n’essaiera pas d’éradiquer toutes les localisations, pensant que la maladie reviendra de toutes façons lors des menstruations suivantes et/ou s’étendra…

Lisez mon débat détaillé avec le Dr Jean Belaisch, datant de 2011 et fait par écrit. Le Dr Jean Belaisch et moi avons incarné les positions opposées et nous sommes affrontés plus d’une fois. En 2007, j’ai lancé une campagne de protestation ouverte contre ses thèses et leur publication, obtenant des victoires (voir l’article « Endométriose: campagne contre la psychologisation, le traitement médicamenteux empirique et la chronicisation. Texte du Dr David B. Redwine sur les tortures psychologiques infligées aux malades ».

Dans ses interventions que vous pouvez lire en détail, en suivant les liens, le leader d’opinion Jean Belaisch a exposé toutes les mystifications, justifiant une médicamentation de longue durée plus la psychologisation et le rejet de la chirurgie. Alors que, face à lui, j’évoquais les thèses du Dr David Redwine (et de quelques autres). Ces positions opposées restent actuelles.

Il m’a fallu batailler plusieurs années pour contrecarrer l’influence du Dr Jean Belaisch dans le monde médical comme sur la seule association de l’époque : EndoFrance, qui l’a promu jusqu’en 2012. Avec des conséquences que toutes les femmes malades (par-delà l’endométriose) paient toujours. Sans aucune aide.

Où étaient toutes les influenceuses qui commencent maintenant à en parler comme si elles découvraient ces informations grâce à leurs « enquêtes » ? Chacune pour elle-même, sans répondre aux essais d’unir nos forces, voire même en me bloquant et en laissant entendre que rien n’aurait existé avant leurs « enquêtes » et réseaux. Ou celles qui préfèrent perpétuer des informations erronées ou inexactes plutôt que d’écouter quiconque lit leurs productions en connaissance de cause et ne fait pas qu’applaudir et diffuser. Depuis le début des années 2000, les attitudes sont assez semblables, et les malades paient le prix des informations incorrectes.

Dans le texte que je traduis ici, le Dr David Redwine rappelle les questions essentielles (détaillées dans les autres traductions sur Pharmacritique, dans mon livre en libre accès, etc.) sur la cause de l’endométriose par des anomalies congénitales. Il s’agit de défauts embryonnaires qui relèvent du registre de la mülleriose, nous démontre David Redwine depuis les années 80. Il explique l’essentiel pour les malades: les conséquences pratiques directes de cette causalité très différente de tout ce que l’on nous raconte.

L’endométriose n’est pas liée aux règles. Elle n’est ni chronique, ni progressive / invasive, ni incurable, ni arrêtable en baissant le taux d’oestrogènes par voie centrale, et il n’y a donc nul besoin de supprimer les règles par des médicaments. Ni de renforcer un système immunitaire supposé défaillant.

Mais « renforcer les défenses immunitaires », détoxifier, consommer des compléments alimentaires et des pratiques exotiques, faire des régimes « sans », etc., c’est un grand marché de la naturopathie.

Dr David Redwine réfute point par point les dogmes quant à la faiblesse immunitaire qui aurait laissé l’endomètre s’implanter et adhérer au péritoine, etc., par exemple dans ce texte traduit; ce sont des étapes cruciales dans toute autogreffe d’endomètre reflué avec la menstruation rétrograde, et pourtant, nous n’avons toujours pas d’images / preuves que ces étapes ont bien lieu.

Lisez les autres textes de David Redwine et vous comprendrez comment la diffusion continue des dogmes et mystifications, par les diverses composantes de l’industrie de l’endométriose, entretient des schémas thérapeutiques inefficaces et risqués. C’est ce cercle vicieux décrit très tôt et repris dans mon introduction de 2011 au texte du Dr David Redwine, « Redéfinir l’endométriose à l’âge moderne ». Il est tellement important que je l’ai republié en 2018 avec une introduction actualisée.

La théorie du reflux menstruel étant le dogme fondateur de l’industrie de l’endométriose, pour sa chronicisation et marchandisation, lorsque cette théorie s’avère fausse, tout l’édifice s’écroule. Et le Dr David Redwine a apporté dès les années 80 les preuves montrant que cette théorie (du sang menstruel qui irait à l’envers, avec les règles, permettant l’implantation de cellules d’endomètre) est fausse. Plusieurs textes traduits en parlent et soulignent les conséquences concrètes en termes de traitement, par exemple les textes déconstruisant la théorie de la menstruation rétrograde de John Sampson et tout ce qui va avec. Un autre texte, traduit récemment, critique la chirurgie d’ablation par des techniques de thermodestruction telles que la vaporisation (carboniser les lésions, les transformer en gaz…) ou l’électrocoagulation.

Les lésions de la mal nommée « endométriose » ne sont pas de l’endomètre, et toutes les analyses ont montré les différences multiples et majeures entre l’endomètre eutopique (muqueuse de l’utérus) et ce que l’on appelle faussement endomètre « ectopique ». Ces lésions sont beaucoup plus diverses que les « kystes chocolat » et autres foyers marron/ noirs dits « typiques ». Elles doivent être identifiées et excisées toutes en même temps.

Dans le texte traduit ici, le Dr David Redwine explique de façon accessible le traitement de l’endométriose par chirurgie d’exérèse laparoscopique (LAPEX). Il nous rappelle comment il en est arrivé à le concevoir et avec quels résultats il l’a pratiqué.

Je reviendrai pour refaire cette introduction. Ce qui compte, c’est le texte ainsi que tous les autres autres traductions. Mes explications et développements, qui partent de ces analyses et prennent en compte aussi d’autres références (dont le Pr Marc Possover), s’étendent sur des centaines de pages, sur Pharmacritique, sur le blog de l’association AVEAG de victimes de médicaments que j’ai fondée en 2006 et partout où j’ai pu intervenir. Déjà à l’époque du forum d’EndoFrance, qui a fermé en 2006 et où l’on ne m’aimait pas beaucoup… Parce que je faisais peur avec mes critiques des médecins à cause de leurs conflits d’intérêts, à cause de l’information différente que j’apportais des pays étrangers et de mes alertes sur les effets indésirables des médicaments, dénoncés d’ailleurs comme inutiles, inefficaces et trop risqués, bons tout juste à servir d’outils dans le commerce. C’était l’époque de gloire de forums tels que Doctissimo, où l’on trouve toujours des textes de 2006 et après, donnant des informations scientifiques, sous mon nom et sous des pseudonymes tels que Livia, Locarella, Ana, Eristikos, Prudentia, Parrhesia…

Que chaque malade qui a subi les mauvais traitements (dans tous les sens du terme) alors que j’alertais officiellement depuis 2007 et donnais les informations, que chaque malade se pose les bonnes questions après avoir soutenu les mêmes influenceurs et les mêmes réseaux d’influence. Les questions sur les responsabilités de chacun dans la propagation et la persistance de la désinformation, des erreurs et même des inepties que l’on peut lire…

J’ai d’autres traductions et informations dans les tiroirs. A vrai dire, c’est le comportement de certaines influenceuses, l’absence de mobilisation ainsi que la marchandisation de l’information qui m’ont dégoûtée à divers moments.

L’original en anglais s’appelle « A Better Approach to the Treatment of Endometriosis« , et il est disponible sur cette page du site Endopaedia. Site qui donne toutes les informations par rubrique (cause, symptômes, traitement, dogmes sur la faiblesse immunitaire, etc.).

Tout est en libre accès, et j’ai toujours fait la même chose. Nous ne pouvons pas dénoncer la précarité causée par la maladie et, en même temps, vendre des produits (recettes, remèdes, livres de soi-disant « enquête » vendant des informations en libre accès depuis 15 ans, programmes de coaching et de moyens « naturels »…) qui ne font que perpétuer l’industrie de l’endométriose. Je dénonce aussi l’absence de responsabilité pour les propos tenus par des influenceurs et des réseaux d’influence et pour les activités de collaboration.

Des auteurs et influenceurs qui ont perpétué les dogmes de l’évangile de l’endométriose, qui ont donné (et surtout contribué à vendre) des produits contenant des erreurs et des absurdités et créant des peurs inutiles, ne devraient-ils / elles au moins rectifier et faire leur mea culpa ? Les éditeurs, les journalistes et les autres communicants qui ont publié ce qui est clairement de la désinformation doivent-ils continuer sans rien dire ? Le livre de Anne Steiger (avec « relecture attentive » par Marie-Rose Galès) publié en 2018 par les éditions Autrement sous le titre « Une araignée dans le ventre. Mon combat contre l’endométriose » est un bon exemple d’erreurs, inepties, contradictions, absurdités et prétentions de connaissance. (Voir cet article pour des détails).

Et vendre des versions des informations scientifiques que les auteurs eux-mêmes (le Dr David Redwine, le Pr Marc Possover et d’autres pionniers) ont donné en libre accès et dont on parle depuis 15 ans en libre accès, cela n’est pas du militantisme pour la cause des femmes et /ou malades en général. Mais c’est faire du commerce, que j’appelle endobusiness et yellow-washing, pour rajouter un produit supplémentaire à l’industrie de l’endométriose. Ce qui entérine cette industrie et l’individualisme néolibéral dans lequel elle s’épanouit. [Elena Pasca]

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TRAITEMENT DE L’ENDOMÉTRIOSE : POUR UNE MEILLEURE APPROCHE

Par le Dr David Redwine

« Lorsque j’ai commencé ma pratique privée, je me suis vite rendu compte qu’une grande partie de tout ce que j’avais appris sur l’endométriose n’avait aucun sens. On m’avait enseigné que l’endométriose était une maladie de femmes stériles, or je voyais dans mon cabinet trois fois plus de patientes souffrant de douleurs que de patientes consultant pour infertilité. De plus, la plupart des patientes avait déjà eu des enfants. En pratiquant une laparoscopie sur des patientes souffrant de douleurs pelviennes, je voyais toujours des petites lésions blanches, claires ou jaunes que ni moi ni mes collègues n’étions en mesure d’identifier. On me disait que ce n’était pas de l’endométriose ni un cancer et qu’il ne fallait pas s’en inquiéter.

Une meilleure identification des [formes et apparences] de l’endométriose

Voulant en savoir plus, j’ai commencé à faire des petites biopsies expérimentales de ces lésions, à travers les outils laparoscopiques. La plupart ont été identifiées [par l’anatomopathologie] comme des formes d’endométriose ! J’ai immédiatement compris la signification et l’enjeu de ces observations : puisque la plupart des patientes présentaient ce type de lésions subtiles et que ces lésions subtiles étaient beaucoup plus fréquentes que les lésions en poudre brûlée (« powder burn« ) décrites dans les manuels, cela voulait dire que notre compréhension de l’endométriose se basait sur des connaissances incomplètes. Par conséquent, je ne pouvais plus me contenter de croire tout ce que l’on m’avait enseigné.

Frappé par la capacité de la chirurgie à révéler la vérité, j’ai commencé par passer en revue la littérature médicale de 1979. Et, déjà à cette époque, il semblait y avoir beaucoup plus de preuves d’efficacité de l’exérèse chirurgicale, en comparaison au traitement médical. Insatisfait du traitement par les pilules contraceptives ou par le Danazol chez certaines de mes premières patientes, j’ai décidé très tôt d’aborder l’endométriose comme une maladie purement chirurgicale. Dès que l’endométriose était confirmée par laparoscopie, je pratiquais immédiatement une laparotomie pour en faire l’exérèse. Plus le nombre et la taille des biopsies laparoscopiques augmentaient, plus le nombre de laparotomies diminuait. J’obtenais un excellent soulagement de la douleur chez la plupart des patientes, et sans qu’il y ait besoin d’un quelconque traitement par médicaments.

Au début des années 80, j’ai décidé d’ériger l’exérèse laparoscopique en traitement standard et de réserver la laparotomie aux cas difficiles.

Besoin de rapidité

Au fil du temps, j’ai acquis de plus en plus de compétences laparoscopiques, notamment pour les indications de chirurgie intestinale; et le nombre de laparotomies nécessaires a donc encore diminué.

J’étais satisfait de tout ce que j’arrivais désormais à traiter par voie laparoscopique, mais il me manquait une chose : la rapidité. Avec la laparotomie, j’avais toujours apprécié de pouvoir effectuer les procédures obstétricales ou gynécologiques de routine en prenant seulement la moitié, voire un tiers, du temps pris par les autres chirurgiens. Même s’il était évident que l’effet de la chirurgie laparoscopique était assez complet et que les patientes se rétablissaient plus rapidement, j’avais le sentiment de progresser moins vite que du temps des laparotomies. Les laparoscopies étaient des procédures longues (prenant jusqu’à 7 heures), physiquement éprouvantes pour moi, pour la patiente et le personnel de l’hôpital. Je savais que la chirurgie devait aller plus vite mais ne savais pas encore par quel moyen et quand j’y arriverais. 

Finalement, en avril 1991, j’ai attaché un câble électrique monopolaire à mes ciseaux de 3 mm et trouvé ainsi ce qui m’avait manqué : la rapidité. Les ciseaux monopolaires ne sont pas faits pour traiter l’endométriose par électrocoagulation ou fulguration. Comme l’exérèse est la seule méthode chirurgicale dont l’efficacité pour éradiquer ou réduire l’endométriose a été démontrée par un suivi à long terme, et comme je ne veux pas utiliser sur mes patientes des méthodes non éprouvées, je pratique l’exérèse de l’endométriose.

Des ciseaux monopolaires me permettent de couper à l’aide de l’électricité, ce qui va assez vite. Un seul et même instrument permet de couper mais aussi de faire une dissection mousse ou tranchante, puis réarranger les tissus et coaguler les saignements; par conséquent, il n’y a plus besoin de changer d’instrument à chacune de ces étapes. Le résultat, c’est une chirurgie beaucoup plus efficiente. Une paire de ciseaux coûte 500 dollars et peut également être utilisée pour effectuer des hystérectomies laparoscopiques, des appendicectomies et des résections segmentaires d’intestin; cela constitue donc une économie importante par rapport aux lasers qui peuvent coûter jusqu’à 150 000 dollars. C’est une méthode de traitement d’autant plus importante à l’avenir, puisque la tendance est à un contrôle des coûts, à une prise de conscience évitant que les chirurgiens et les hôpitaux ne pratiquent des prix abusifs.

L’exérèse tient la route lors des épreuves de validation scientifique 

L’exérèse répond aux exigences de la science en permettant une identification positive (par les biopsies) de ce qui a été enlevé. Avec la vaporisation au laser et l’électrocoagulation, nous n’avons que l’avis du chirurgien sur ce qui a été détruit et sur la complétude de cette destruction. Or toutes les lésions enlevées ou détruites peuvent ne pas être de l’endométriose, même si le chirurgien pense que c’est le cas. Et seule la biopsie permet une confirmation.

A la différence de la vaporisation au laser ou de l’électrocoagulation, l’exérèse n’est pas limitée à des zones particulières du pelvis. Les lésions peuvent être excisées n’importe où dans le corps, sans risque élevé d’infliger des dommages aux structures vitales sous-jacentes.

Dans certains cas plus difficiles, il a été nécessaire d’enlever un quart de la vessie, y compris le trigone, avec repositionnement des uretères ; d’autres cas ont nécessité une exérèse de l’endométriose du nerf obturateur, ou alors l’exérèse de l’endométriose sur la surface du sacrum ou sur l’os iliaque.

Se spécialiser dans l’endométriose 

Je ne pratique que des chirurgies de l’endométriose. Par conséquent, les interventions chirurgicales difficiles sont habituelles, quelque chose d’ordinaire dans chaque journée de travail, avec tout ce qu’il faut mettre en œuvre pour éliminer complètement l’endométriose. Or cela diffère du quotidien d’autres chirurgiens, par exemple du travail d’un obstétricien qui ne voit qu’un ou deux cas d’endométriose par mois et peut ne pas avoir les compétences nécessaires pour traiter les cas difficiles. Lorsqu’un tel clinicien éliminé l’endométriose de façon incomplète, cela peut entraîner des interventions chirurgicales répétées, inutiles et inefficaces pour de nombreuses patientes.

La compétence en matière de chirurgie de l’endométriose ne vient qu’avec le temps passé en salle d’opération. Rien qu’au cours des quatre dernières années, j’ai passé près de 2 000 heures à pratiquer des opérations d’endométriose.

Exérèse laparoscopique (LAPEX)

Quelques faits sur l’exérèse laparoscopique :

  • Les techniques et procédures d’exérèse sont les techniques chirurgicales standard que tous les médecins utilisent pour faire des laparotomies.
  • L’utilisation d’instruments laparoscopiques standard permet de maintenir les coûts des soins à un niveau raisonnable, mais sans pour autant sacrifier la qualité des soins.
  • Tous les tissus excisés sont envoyés en anatomopathologie pour obtenir un diagnostic. Rien n’est laissé au hasard. Aucune supposition n’est faite sans preuve quant aux tissus excisés. Tous les tissus anormaux sont prélevés, quelle que soit leur localisation.
  • La chirurgie laparoscopique peut être utilisée non seulement pour faire l’exérèse de l’endométriose à n’importe quel endroit du pelvis, mais aussi pour effectuer des appendicectomies, des neurectomies présacrées, des résections des ligaments utérosacrés, ou encore l’exérèse de kystes, de tumeurs fibroïdes [fibromes / myomes], de lésions intestinales ainsi que des ovaires ou des trompes, lorsque cela est nécessaire.
  • L’existence d’adhérences très denses ou étendues ou alors certaines lésions intestinales peuvent nécessiter une laparotomie. La plupart des opérations commencent en utilisant le laparoscope; le passage à la laparotomie se fait automatiquement dans les cas où toutes les lésions ne peuvent être enlevées par la seule voie laparoscopique.

Résultats de l’exérèse laparoscopique (LAPEX)

Grâce à plusieurs études datant de l’époque d’une pratique extensive de la laparotomie, nous savons que l’exérèse a fait ses preuves. Le suivi des patientes dans le temps (follow-up), après une procédure LAPEX, montre que ce bilan favorable peut être reproduit aussi par voie laparoscopique. De nombreux types de traitements médicaux ou chirurgicaux ne disposent pas de ce type de suivi à long terme [permettant de vérifier les résultats dans le temps]. En chirurgie, il est très difficile d’effectuer des études contrôlées, donc le mieux que l’on puisse faire actuellement est de fournir un suivi détaillé et à long terme pour noter les effets du traitement chirurgical sur l’endométriose.

Se focaliser sur la maladie, pas sur les symptômes

De nombreuses études sur le traitement médical ou chirurgical se sont concentrées sur la réponse des symptômes (infertilité ou douleur) plutôt que sur la réponse de la maladie. Or étant donné que les symptômes peuvent être dus à d’autres facteurs (voir le texte « Ma douleur est-elle due à l’endométriose ? »), l’accent mis sur les symptômes s’est déplacé de l’effet réel qu’un traitement exerce sur l’endométriose vers l’effet sur des symptômes que l’on suppose (parfois à tort) être dus à l’endométriose. L’on a fait cela pendant de nombreuses décennies avec l’endométriose, et nous avons là l’une des faiblesses de l’étude de l’endométriose, puisque l’on a considéré que la réponse des symptômes était indicative de la réponse de la maladie elle-même. Par exemple : « Puisque la douleur s’atténue avec la grossesse ou après la ménopause, cela signifie que la grossesse ou la ménopause détruisent l’endométriose ».

Considérations sur la comparaison des études de suivi

  • Alors que le suivi de l’étude LAPEX commence 6 mois ou plus après l’intervention chirurgicale, la plupart des études sur les [effets des] traitements médicaux se sont arrêtées à la fin du traitement ou dans les 6 mois qui ont suivi.
  • Idéalement, les études devraient être corrigées en tenant compte des patientes perdues de vue. Elles doivent également permettre un étalement des résultats dans le temps, de sorte qu’un pronostic puisse être donné à tout moment après l’intervention chirurgicale. La méthode statistique qui satisfait à cette exigence est appelée analyse actuarielle des tables de survie (actuarial life table analysis). 
  • Pour une évaluation précise de la cohérence d’une méthode de traitement, un nombre suffisant de patients doit être suivi; et « plus il y en a, mieux c’est ».
  • Enfin, la qualité du suivi est le reflet de la motivation du chercheur clinicien.

La chirurgie seule permet d’éradiquer l’endométriose efficacement et définitivement chez la plupart des patientes 

Certes, nous ne connaissons pas le véritable état de santé des patientes qui n’ont pas eu besoin d’être réopérées. Mais mes résultats et ceux d’autres chirurgiens pratiquant l’exérèse sont une indication certaine du fait que l’endométriose peut être éradiquée efficacement et de façon permanente chez la plupart des patientes, par la seule chirurgie. Cela réfute l’idée que l’endométriose « revien[drait] toujours », qu’elle augmenterait avec une extension géographique au fil du temps, ou que la chirurgie offrirait tout au plus une « réduction de volume » (« debulking« ) dans la mesure où il serait « impossible d’enlever toute la maladie ».

Outre la validité discutable de ces conceptions, nous devons prendre en compte aussi toutes leurs conséquences pratiques sur la prise en charge, parce qu’elles créent des obstacles à la pratique d’une bonne exérèse chirurgicale de l’endométriose. Jusqu’à présent, les seules études qui ont spécifiquement examiné la question de la répartition géographique de l’endométriose au fil du temps n’ont montré aucune augmentation de la quantité d’endométriose trouvée dans les groupes d’âge des patientes plus âgées. Cela traduit les constats de cette étude de suivi, à savoir le fait que la quantité d’endométriose n’augmente pas. L’exérèse est une forme de traitement très efficace, qu’elle soit pratiquée par laparoscopie ou lors d’une laparotomie.

Nous n’en savons pas assez sur l’endométriose

Nous n’en savons tout simplement pas assez sur l’endométriose – voilà une évidence pour tous ceux qui étudient cette maladie.

Beaucoup de nos problèmes actuels sont liés au fait que, faute de biopsies systématiques, les opinions formulées par association d’idées partant d’observations cliniques n’obtiennent pas de confirmation par l’anatomopathologie. La plupart des chercheurs reconnaissent que les études à venir doivent impérativement inclure un contrôle accru [des théories] par le recours aux biopsies. Par ailleurs, si tant est qu’un traitement médical réellement efficace puisse un jour être mis au point, il le sera en grande partie grâce à l’étude des spécimens d’endométriose excisés lors de la chirurgie. Par conséquent, la chirurgie de l’endométriose continuera à jouer un rôle prédominant dans l’étude et le traitement actuels et futurs de l’endométriose. »

© Copyright David Redwine et Elena Pasca pour la version française

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