Risque d’accident vasculaire cérébral sous antidépresseurs. Effets indésirables confirmés par des études

La littérature médicale sur les effets indésirables des antidépresseurs est déjà bien fournie. Ici, je souhaite simplement signaler la parution Prozac.jpgd’une nouvelle étude dont les résultats comprennent certes quelques paradoxes, mais ne sont pas dénués d’intérêt.

Il y a eu l’étude de décembre 2009 de Smoller et al parlant du risque plus élevé de décès (toute cause confondue) et d’accident vasculaire cérébral (AVC) chez les femmes ménopausées sous traitement. Ces résultats semblent pouvoir être extrapolés aussi aux hommes, même si les données générales sont parfois contradictoires et que les mécanismes ne sont pas bien compris. Et pourtant, les auteurs de cette nouvelle étude, Chi-Shin Wu et al, parue le 15 mars et montrant un lien entre les AVC et la prise d’antidépresseur peu de temps avant, affirment que leurs résultats doivent être pris en compte dans l’élaboration des recommandations de bonne pratique et dans les décisions de santé publique.

En décembre 2009, l’étude de Jordan W. Smoller et al. parue dans Archives of Internal Medicine nous apprenait que les femmes ménopausées sous antidépresseurs de type tricyclique (amitriptyline, etc.) ou inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (notamment : Prozac, Seroxat/Deroxat, Zoloft et Seropram/Seroplex) voyaient augmenter légèrement leur risque de faire un accident vasculaire cérébral par hémorragie ; elles avaient aussi un risque un peu plus élevé de décéder (toutes causes confondues). Les données sont extraites du Women’s Health Initiative, et les résultats sont résumés sur cette page.

Smoller, J.W. Antidepressant Use and Risk of Incident Cardiovascular Morbidity and Mortality Among Postmenopausal Women in the Women’s Health Initiative Study, Archives of Internal Medicine, décembre 2009;169(22):2128-2139.

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Image tirée de cette page, où l’on peut visionner une vidéo explicative.

 

Le 15 mars 2011, la revue American Journal of Psychiatry a publié sur son site une étude menée par Chi-Shin Wu et al à Taiwan, à partir des registres des assurances santé : « Association of Cerebrovascular Events With Antidepressant Use: A Case-Crossover Study ».

L’équipe a retenu 24.214 patients ayant subi un accident vasculaire cérébral, sur une durée allant de 1998 à 2007. Il s’agissait de confirmer ou d’invalider les données allant dans le sens d’effets indésirables cardiovasculaires des antidépresseurs, surtout de la classe des ISRS, qui sont probablement dus aux risques de vasoconstriction des artères cérébrales ainsi que d’hémorragie, avec ses complications. Les résultats ne sont pas dénués de paradoxes : plus les médicaments ont un effet fort sur l’inhibition de la recapture de la sérotonine, plus le risque d’AVC de type ischémique est fort, alors que l’on sait que des inhibiteurs faibles sont associés à des accidents vasculaires cérébraux de tous types.

D’autre part, s’il est clair que la prise d’un antidépresseur deux semaines avant l’AVC est en rapport avec celui-ci, cela est moins clair pour des prescriptions de plus longue durée. Un usage prolongé pourrait même être un facteur protecteur contre les AVC…

Les résultats sont résumés ainsi :

“The adjusted odds ratio of stroke risk with antidepressant exposure was 1.48 (95% confidence interval=1.37–1.59) using 14-day time windows. Stroke risk was negatively associated with the number of antidepressant prescriptions reported. La prise d’antidépresseurs avec inhibition élevée du transporteur de la sérotonine était associé avec un risque plus élevé d’accident vasculaire cérébral que la prise d’autres types d’antidépresseurs. 

Conclusions: Ces constats suggèrent que la prise d’antidépresseurs peut être associée à un risque augmenté d’accident vasculaire cérébral. Toutefois, les mécanismes sous-jacents ne sont pas clairs. »

Malgré certains paradoxes et quelques limitations dans le traitement des données, les auteurs considèrent que ces résultats ont des implications majeures à la fois quant à la pratique clinique et quant à la santé publique. Ils recommandent de commencer le traitement par antidépresseur à des doses faibles et de contrôler activement les effets secondaires, parce que les risques d’accident vasculaire cérébral semble être dose-dépendant et apparaître lors des premières prescriptions.

A noter aussi l’article de Pharmacritique daté du 7 juillet: « Une étude suédoise estime à 3% le taux de décès par effets indésirables des médicaments. Les antidépresseurs arrivent en troisième position ». Les antidépresseurs sont mis en cause dans 14% des 1574 cas de décès liés aux médicaments.

Voir aussi les articles de la catégorie « Dépression, antidépresseurs« , ainsi que ceux réunis sous les multiples catégories parlant de la psychiatrie et des effets secondaires des médicaments (liste alphabétique des catégories à gauche de la page).

 

Elena Pasca

Copyright Pharmacritique

6 réflexions au sujet de “Risque d’accident vasculaire cérébral sous antidépresseurs. Effets indésirables confirmés par des études”

  1. Les antidepresseurs existent parce que ce monde est fou. C’est la société qui fait la depression; la même qui colmate les brêches avec des produits industriels de la pharmacie. C’est ce monde, le monde de l’argent, qui est pourrie jusqu’à l’os. C’est de ce monde dont il nous faut nous débarrasser, et ainsi en finir avec les anti-dépresseurs et autres poisons. Monde de fou, qui fabrique des centrales nucléaires sur un archipel traversé par des lignes de failles….

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  2. A MGFRANC
    Ce qui m’importe, ce n’est pas tant de dire aux médecins ce qu’il en est, car, comme pour la nitrofurantoïne, certaines informations sont forcément déjà connues.
    Non, le plus important pour moi – et je l’ai souligné dans l’article sur cet anti- infectieux, c’est d’informer le grand public qui n’a pas accès aux RCT. De façon à ce que tout le monde puisse trouver l’information par une simple recherche et ne dépende plus du bon vouloir des médecins français et des autorités sanitaires, trop dépendants des pharmas. Ni de revues payantes, d’ailleurs.
    Bon après-midi!
    E. Pasca

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  3. A Delcuse,
    votre commentaire rejoint – quoique partant de prémisses autres et par un raisonnement différent – l’une des interrogations de la Théorie critique (Ecole de Francfort (en philosophie et sciences sociales), c’est-à-dire le courant interdisciplinaire dans lequel j’ai été formée pour la plupart):
    Et si c’était la société qui était malade et que tout moyen d’adaptation signifiait une réduction de la subjectivité à un standard de normalité défini par l’identification totale avec les rôles sociaux et les comportements socialement valorisés – et déterminés de part en part par le système existant (économique, avec ses traductions sociales)?
    La psychanalyse dans le cadre de la Théorie critique – ainsi que la psychologie sociale, en particulier celle analytique, initiée par ce courant – posent ce type de questions. Qui se retrouvent par ailleurs aussi dans la littérature allemande d’après 1945, fortement influencé par les positions esthétiques de la même Théorie critique (écrits de Theodor W. Adorno, mais pas seulement).
    Je conseille la lecture de l’ouvrage de Hans Magnus Enzensberger, « Médiocrité et folie » (traduction française de Mittelmass und Wahn), par exemple. Ces essais sont plus accessibles que les ouvrages philosophiques.
    Elena Pasca

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  4. @Delcuse : La dépression est PHYSIOLOGIQUEMENT expliquée elle n’est pas uniquement liée à la société, simplement sans la société elle aurait p-e un autre nom que la simple maladie. A ne pas confondre avec un coup de blues ou une déprime, que seuls des phénomènes psychologiques expliquent.

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