Après Mediator… Revue des stratégies de désinformation, formes d’influence et conflits d’intérêt

Article détaillant sur 15 pages les principales tares du complexe médico-industriel, paru le 15 janvier 2011 sur l’ancien blog Pharmacritique.

Entre autres: nouvelles tendances telles que prééminence du marketing relationnel vs R&D; données socio-économiques des laboratoires pharmaceutiques; conflits d’intérêts des associations; leaders d’opinion (médecins et leaders associatifs) qui verrouillent le système de santé et de soins; industrie du cancer; irrationalité de la pensée s’agissant de certains médicaments; absence d’analyse coût – efficacité; formation médicale continue et presse médicale dans les mains des pharmas; certains propos de Christian Lajoux; l’hypocrisie générale des autorités sanitaires et des médecins quant aux conflits d’intérêts; l’ineptie des codes volontaires de déontologie, etc. Tout cela avec des liens pour approfondir.

Le lundi 10 janvier 2011 à 19 : 00, j’ai participé à un débat sur la LCP (La chaîne parlementaire – Assemblée nationale), intitulé « Médiator: faut-il avoir peur des médicaments? » Il s’agissait de situer le Médiator dans le contexte, de comprendre comment ce « drame » – que le patron de l’industrie pharmaceutique Christian Lajoux » désignait comme un « accident » – a pu se produire et si d’autres catastrophes sanitaires sont actuellement en cours ou à venir.

Les participants étaient: Gérard Bapt (député PS, cardiologue de formation), José Duquesnoy  (président de l’association des victimes du Médiator ADVM, de la région du Nord), Christian Lajoux  (président directeur général de Sanofi-Aventis France et patron du L€€M (syndicat patronal des 300 laboratoires pharma actifs en France) et moi-même (Elena Pasca, philosophe, administratrice de la Fondation Sciences Citoyennes et « auteure » de Pharmacritique). Le débat était animé par le présentateur de l’émission « Ca vous regarde »,  Arnaud Ardoin.

Les informations, liens, explications et analyses dépassent très largement les thèmes abordés lors du débat.

La vidéo de l’émission (48 minutes) et l’annonce par la LCP se trouvent dans cet article. Ici, je souhaite rappeler – sur une quinzaine de pages – certaines problématiques essentielles, en donnant des liens pour approfondir. Bref, ce que j’aurais voulu dire dans l’émission si j’avais eu le temps…

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Une image très négative de l’industrie pharmaceutique, d’où l’urgence d’une communication très soignée…

Dans des pays où l’opinion publique a pris conscience de la gravité de la situation, suite à des scandales révélés par des media qui font leur travail au quotidien – et non pas une fois par décennie, comme chez nous pour le Médiator -, l’image des laboratoires pharmaceutiques est très détériorée.

Un sondage commandité en 2005 par la Kaiser Family Foundation confirmait l’effondrement de l’image de l’industrie pharmaceutique, et ce malgré les mécénats et autres œuvres de charité pour lesquelles elle dépense plus que d’autres industries aux Etats-Unis.

Seules l’industrie pétrolière et celle du tabac faisait pire. Pour 70% des personnes interrogées, c’est l’industrie pharmaceutique qui est la plus avide de profits et, pour ce faire, met le profit avant les êtres humains, profite de leur malheur.

Selon un sondage de Harris de décembre 2010, les trois industries qu’il est le plus urgent et indispensable de contrôler et de réguler sont, dans l’ordre, l’industrie pétrolière, celle pharmaceutique et celle du tabac. Ces trois sont aussi les moins dignes de confiance et les plus susceptibles d’être malhonnêtes. (Je reviendrai sur cette image dégradée des laboratoires, car il est évident qu’elle explique le recours accru à tout ce pourrait la redresser, donc à des lobbyistes et leurs méthodes publicitaires et de relations publiques).

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LEEM : la branche française du lobby le plus puissant au monde, celui qui dépense le plus en activités de lobbying / communication / relations publiques

Je commence par rappeler quelques-unes des notes parues sur Pharmacritique au sujet du L€€M (Les Entreprises du médicament), représenté par Christian Lajoux lors du débat, histoire de mieux faire comprendre de qui il s’agit. Car il y a une grande différence entre l’image et la réalité, entre le discours et les actes, et j’ai rappelé lors du débat que l’industrie pharmaceutique emploie moult cabinets de lobbyistes qui servent à lisser l’image et à maîtriser la communication et les artifices rhétoriques de façon à détourner le débat vers des terrains consensuels ou en tout cas pas minés, pas de nature à éveiller un esprit critique peu aiguisé en France.

Ceux qui ont suivi les deux séminaires d’ETAL (Encadrement et Transparence des Activités de Lobbying) ont pu mieux comprendre à quel point un lobbyiste maîtrise les techniques de persuasion les plus perfectionnées, qui peuvent vous convaincre que 2 + 2 = 5, malgré toutes les preuves contraires.

Les représentants des pharmas se cachent toujours derrière  diverses formes de clichés du genre: l’industrie pharmaceutique crée des emplois, est indispensable à la société sous sa forme actuelle, car c’est elle qui lui permet les investissements et la recherche permettant de soigner et guérir des maladies telles les cancers, le SIDA, etc.

Ce sont des lobbyistes qui élaborent pour leurs clients les réponses et les stratégies rhétoriques, et j’avais fait remarquer aux autres participants, avant l’émission, qu’il ne fallait pas suivre Christian Lajoux sur ce terrain-là, parce que nous ne pouvions pas à la hauteur. Je le sais pour avoir suivi et analysé la nature de ses interventions médiatiques, servi comme il est par des journalistes pour le moins serviables, si ce n’est serviles. Si les interlocuteurs laissent Lajoux poser les termes du débat, c’est fini, c’est lui qui mène la danse, et les autres perdent leur temps de parole à déjouer les pièges et autres artifices rhétoriques, au lieu de discuter de façon argumentée et chiffrée, sans langue de bois.

Mais la structure d’un tel débat – interventions courtes, alors qu’il ne peut y avoir de réponse par oui ou par non à de telles questions – et le temps imparti (48 minutes pour quatre intervenants, plus les questions du journaliste, plus les interventions de deux spectateurs dont l’un était un ancien visiteur médical, habitué de l’émission, venu soutenir ses (anciens?) patrons – ne permet pas d’aller au-delà des généralités.

Voici quelques articles et notes (réunis sous la catégorie « Ethique et pharmas, firmes et LEEM ») qui en disent long sur la situation actuelle, où l’industrie pharmaceutique mène la danse, et pas seulement par la rhétorique: on laisse le L€€M s’autoréguler, émettre un code volontaire de bonne conduite, non contrôlée et une charte de la visite médicale, tout aussi volontaire… Ces deux caricatures (celle-ci et celle-ci) montrent à quoi ces codes de déontologie volontaire (sic) peuvent servir, d’un point de vue pragmatique…

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Sarkozy, industrie pharmaceutique et conflits d’intérêt : le poisson pourrit par la tête…

Cette autorégulation bafoue par ailleurs tous les principes, à commencer par le sens du terme « déontologie », qui est tout sauf volontaire, puisqu’elle relève même pas des éthiques relatives, arbitraires, concurrentielles, mais de la morale et de ce qu’elle a de normatif, par-delà les applications éthiques. Tout cela signifie en clair qu’on se fiche des principes et de la morale.

Mais après tout, Nicolas Sarkozy n’avait-il pas l’intention de « débarrasser » le droit des affaires des (maigres) obstacles qui s’opposaient à la toute-puissance des firmes ? Ne disait-il pas, se référant cette fois-là directement aux obstacles sur le chemin des laboratoires, que l’industrie pharmaceutique était beaucoup trop contrôlée, subissait trop de tracasseries de la part d’une administration trop tatillonne, qui empêchait le flux libre des affaires des firmes ?

Cette affirmation est toute récente : Sarkozy l’a faite lorsqu’il a décoré Jacques Servier, président du laboratoire du même nom qui a produit le désormais célèbre Médiator° (benfluorex), de la Légion d’honneur, pour services rendus à la République et pour être un modèle entrepreneurial…

Je ne m’attarde pas ici sur les conflits d’intérêts de Sarkozy, de sa famille, avec l’industrie pharmaceutique, sujet traité in extenso dans un article largement plagié et déformé. Voici l’original, daté du 5 mars 2009 : « Plan Alzheimer et conflits d’intérêts: les Sarkozy, Sanofi, recherche publique, franchises médicales… Les deniers publics feront les profits privés ».

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Décorer aussi le LEEM, pour son travail « dans l’intérêt général » ?

Vu toutes les personnalités qui en font partie ou du moins travaillent avec, ce serait peut-être plus simple que de les décorer un par un… Et puis, si jamais c’est comme ça que la Sécurité sociale doit faire des économies, par des médicaments tueurs, il faudra changer quelques principes au passage… Et décorer aussi le LEEM – pour le compte de Merck – pour les mêmes raisons, vu que le Vioxx° (l’anti-inflammatoire rofécoxib) a été prescrit très largement en France et qu’il a donc forcément tué très largement. Comme je le disais lors du débat, on ne peut quand même pas imaginer qu’il n’a tué qu’aux Etats-Unis, où il était question d’une fourchette allant d’au moins 30.000 morts reconnus à 140.000 crises cardiaques et autres soucis cardiovasculaires à issues diverses). Sur le Vioxx, voir cet article détaillé et cette parodie vidéo, par exemple.

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La crise : une aubaine pour les laboratoires pharmaceutiques… Détails socio-économiques

L’autorégulation des commerçants, surtout dans un secteur aussi sensible que la santé publique, c’est la démission des pouvoir publics et leur faillite, traduite dans les courbettes faites aux entreprises, en particulier à l’industrie pharmaceutique, dont on dit que c’est LE secteur le plus porteur de l’économie européenne, qui n’a même pas connu la crise, donc nous aide à nous en sortir… Sauf que la philanthropie n’a jamais été le moteur des pharmas, comme on le verra plus loin en arrivant aux chiffres du rendement et de ce qu’elles donnent aux actionnaires, au lieu de réinvestir et de financer la recherche porteuse d’innovations, pas de copies de ce qui existe déjà…

En effet, les pharmas ont au contraire profité de la crise, qui leur a permis de racheter pour une bouchée de pain des petites entreprises de biotechnologie ou d’autres petits laboratoires.

Voir par exemple mon article en date du 21 octobre 2008 : « Les firmes pharmaceutiques profitent de la crise, malgré l’absence d’innovation. Elles vont dévorer les biotech ».

Comme l’ont démontré Léo-Paul Lauzon et Marc Hasbani, les laboratoires pharmaceutiques les plus importants jouissent d’un véritable oligopole, ont un taux de rendement s’élevant à 41% ( !), une hausse de 182 % de leurs bénéfices en l’espace de dix ans, elles versent 77% de leurs profits à leurs actionnaires, ont des capitaux propres – disponibles facilement sous forme de liquidités – beaucoup plus allègrement que n’importe quelle banque au monde ; leur taux d’endettement est quasi inexistant ; elles dépensent 14 fois plus en marketing et administration et versent 6 fois plus d’argent à leurs actionnaires qu’elles n’en consacrent au renouvellement de leur actif à long terme.

Voir à ce sujet l’article paru sur Pharmacritique : « L’industrie pharmaceutique investit dans le marketing, plus profitable que la recherche. Ses intérêts financiers sont contraires à l’intérêt général ».

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Marketing, disease mongering et communication pour une médicalisation de la vie. Contrôle social et nouvelle « normalité », ordonnée et fichée

En plus des écrans de fumée que sont les codes volontaires de « déontologie » des firmes de tout poil, on entend aussi de plus en plus le discours sur la « responsabilité sociale » des entreprises et d’autres antiennes lénifiantes du même genre : dormez tranquilles, la « main invisible » du marché se charge de corriger le tir, en éliminant par des balles de diverses nature (médicaments tueurs, suicides d’employés, sacrifices de vies entières de personnes obligées de se vendre pour trois sous…) les « inadaptés », ceux-là même que l’individualisme qui n’est qu’un avatar idéologique de ce néolibéralisme de plus en plus carnassier se charge de culpabiliser en leur disant que c’est leur faute s’il ne savent pas « se vendre », s’adapter, endosser des rôles socialement valorisés, etc.

Je ne divague pas du tout, puisque c’est cette idéologie-là qui permet la médicalisation de la vie et le disease mongering qui en est l’une des conséquences majeures (voir les articles de cette catégorie) et tout ce qui va avec.

Il est socialement acceptable de se dire malade (gober des antidépresseurs et autres psychotropes), mais inacceptable d’exprimer son mal de vivre en synchronie totale avec une époque invivable, qui crée un standard artificiel de normalité et n’accepte plus aucune déviance par rapport à la « norme », au lit de Procuste qu’elle instaure par le biais des médecins. Ceux-ci sont bras armé d’un biopouvoir qui discipline les corps et les esprits comme jadis les prêtres, qui écoutent les confessions (enfin, façon de parler, car en 10 minutes, c’est difficile…) et instaurent les contritions, les mêmes pour tout le monde, à coups de pilules, de bistouris et d’autres dispositifs qui gomment tout dilemme éthique, tout questionnement moral, toute subjectivité qui devrait être synonyme d’esprit critique.

Ainsi, gommant chimiquement les dilemmes de la subjectivité (Alain Ehrenberg), le pouvoir en place peut obtenir des zombies ajustés au marché, relookés et coachés, normalisés à coup de psychotropes et autres instruments pharmacologiques de contrôle social tels que les politiques hygiénistes (interdictions multiples venues de la « science » et passées dans les moeurs: tabac, alcool, obésité…). Une véritable ingénierie sociale voit le jour peu à peu, la société est quadrillée de part en part, ordonnée, bien classifiée et catégorisée selon les cases des différents fichiers.

Voir à ce sujet les articles des catégories « Normalité, contrôle social, culture psy », « Psychiatrie, psychotropes, culture psy, dérapages », « Dépression, antidépresseurs », « Psychiatrie, culture sécuritaire, exclusion des fous », « Antipsychotiques, trouble bipolaire, cyclothymie », « Surmédicamentation, overdose », « médicalisation des femmes, ménopause, THS », etc.

Ce serait cela le progrès ? C’est en tout cas l’un des avatars de « La passion de l’ordre » dont parlent Roland Gori et Marie-José del Volgo, auteurs de « La Santé totalitaire. Essais sur la médicalisation de l’existence ». Cette médicalisation infinie analysée par Ivan Illitch, décrite par des auteurs tels que Peter Conrad, Nortin Hadler, David Healy, Robert Whitaker, Paula Caplan, Barbara Mintzes, Janet Currie, Joanna Moncrieff, Ray Moynihan, Jœrg Blech, Christopher Lane, Gilbert Welsch et tant d’autres.

La médicalisation / surmédicalisation est un instrument de la biopolitique dénoncée par la Théorie Critique et par Michel Foucault. Transposée à l’aide de ces « dispositifs de pouvoir » disséminés qui prennent la place de la domination verticale bien lisible qui distinguait le capitalisme auparavant. C’est un dévoiement de l’esprit comme de la lettre de ce que les Lumières se donnaient pour objectif en misant sur les sciences : faire progresser la connaissance de l’homme sur lui-même, à des fins morales.

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Changement de stratégie publicitaire : panne de l’innovation, l’une des raisons de l’accent massif mis sur le marketing

La crise a aussi servi de rationalisation à la fermeture d’unités de production, au licenciement de visiteurs médicaux (800 d’un coup chez Sanofi), et ainsi de suite.

En réalité, il ne s’agissait pas d’une nécessité économique, mais d’un changement de stratégie : l’opinion publique – même celle française très mal informée (ou très bien désinformée, c’est selon) – réalise de plus en plus que les visiteurs médicaux sont des commerciaux qui influencent par diverses méthodes les prescriptions des médecins, avec le consentement de ceux-ci, qui ne sont nullement des victimes (dans l’affaire du Médiator non plus !). Parce que d’anciens délégués médicaux parlent, on en apprend de plus en plus sur leurs méthodes, comme on le voit dans les articles réunis sous la catégorie « Délégués médicaux, visiteurs médicaux, méthodes… », et en particulier dans l’article choc relatant les confidences de l’ancien visiteur médical Shahram Ahari, avec lequel j’ai eu le plaisir d’échanger et qui fait actuellement des études de médecine.

L’industrie pharmaceutique ne produit plus rien, les pipelines sont vides, et on peut à peine dire d’une molécule sur 100 qu’elle apporte un certain plus par rapport aux médicaments déjà existants. Que faire dans cette situation de panne de l’innovation qui dure depuis une quinzaine d’année et va encore s’approfondir, puisque d’ici 2012, beaucoup de blockbusters verront leurs brevets expirer et entreront donc en concurrence avec les génériques ? (Cette situation de panne sèche et ses conséquences sont bien décrites dans la Déclaration de l’ISDB (International Society of Drug Bulletinssur l’arrêt du progrès thérapeutique : voir cet article ou encore celui-ci et celui-ci).

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Inversion du rapport entre marketing et R&D et nouveau type de marketing

La réponse des firmes se prépare depuis longtemps : glisser vers le marketing à tout prix, inverser le rapport entre recherche et développement (R&D), d’une part, et marketing, d’autre part.

Le marketing se fait relationnel, dans tous les sens du terme. Les visiteurs médicaux prennent les médecins par les tripes, cultivent le « facteur humain » ainsi que l’obligation de réciprocité issue du moindre cadeau – cela, les études l’ont largement montré. Pas besoin d’un cadeau de valeur, qui peut être au contraire contre-productif pour certains professionnels ou associatifs ainsi gratifiés, puisque la valeur est immédiatement perçue comme induisant un lien d’intérêt et une attente de retour sur investissement. Non, plus le cadeau est insignifiant, plus l’influence est inconsciente. (J’en ai parlé en détail à plusieurs endroits, avec des références, inutile donc de revenir là-dessus).

Vous pouvez lire, outre les articles parlant des méthodes des visiteurs médicaux, ceux consacrés à la formation médicale continue, financée à 98% par les firmes pharmaceutiques. Rien que ça. Les médecins doivent être trop pauvres pour se payer leur formation, comme le font les autres professions libérales. Faut-il faire une quête?

Mais les moyens d’influence ne s’arrêtent pas là, comme je l’ai dit en parlant du verrouillage du système, par la presse médicale financée presque à 100% par les pharmas (voir l’empire de presse de Gérard Kouchner, frère de l’ancien ministre de la Santé, par exemple), comme par la présence des leaders d’opinion ayant des conflits d’intérêts, qui occupent toutes les articulations stratégiques du système et permettent de l’instrumentaliser et l’exploiter dans le sens voulu.

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Conflits d’intérêts des associations

C’est cela que j’aurais voulu expliciter lors du débat sur la LCP, lorsque Gérard Bapt a conseillé au président de l’association des victimes du Médiator de la région Nord de s’adresser à des grandes associations de malades telles l’AFD (Association Française des Diabétiques).

Mais je n’ai eu le temps que de mentionner ce glissement des anciens supports vers le marketing relationnel, assuré surtout par les leaders d’opinion (key opinion leaders), qui sont soit des médecins (ou autre professionnels de santé) soit des leaders associatifs, parce qu’il ne faut pas oublier les conflits d’intérêts des associations de malades (voir les articles de cette catégorie, et surtout l’analyse détaillée et chiffrée du journal suisse Der Beobachter sur la part de financement industriel dans le budget de bon nombre d’associations). Le CISS (Collectif Interassociatif sur la Santé) donne le (mauvais) exemple, puisqu’il est financé en partie par Pfizer. Une honte pour une association censée nous représenter tous !

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L’exemple de l’ Association Française des Diabétiques

Gérard Bapt m’a répondu que l’AFD n’était pas financée par Servier. Soit. Mais cela ne veut pas dire qu’elle n’a pas de financement industriel… Et on sait très bien que les pharmas sont solidaires, elles. Après tout, Christian Lajoux représente les 300 laboratoires ayant des intérêts en France, Servier compris.

Quoi qu’il en soit, j’ai une question en passant : qu’on me dise qu’est-ce que l’AFD a fait à propos des risques du Lantus (insuline glargine) et d’Avandia (rosiglitazone) ? Ce dernier a été retiré du marché, mais après des années – et moult victimes, certainement… Le Lantus étant en plus un médicament de Sanofi, notre firme nationale, il y a fort à parier que l’affaire restera étouffée, jusqu’à ce qu’un autre pays le retire et que le scandale ne puisse plus être contenu.

Qu’est-ce que l’AFD a fait à propos d’Accomplia (rimonabant), autre médicament anti-obésité (associée au diabète) refusé aux Etats-Unis ? C’est un autre produit de Sanofi-Aventis, laboratoire qui avait même mis au point un plan pour museler la presse et donné une feuille de route aux leaders d’opinion qu’il paie, pour leur dire comment voler au secours de ce médicament – plan révélé par le Canard enchaîné. Accomplia a lui aussi été retiré d’abord à l’étranger. Comme d’habitude, nos autorités d’insécurité sanitaire n’ont réagi que lorsqu’elles ne pouvaient plus faire autrement.

Les conflits d’intérêts des associations sont peut-être encore plus pernicieux car invisibles – non déclarés et mêmes non soupçonnés, tant l’associatif va de pair avec une image de bénévolat, de respectabilité, de désintéressement et de dévouement.

Et c’est justement cette image-là que les laboratoires pharmaceutiques veulent instrumentaliser lorsqu’ils financent les associations de patients, s’assurant ainsi une publicité très efficace pour leurs médicaments respectifs. Car on ne perçoit pas le commerce dans ce milieu; on a au contraire l’image d’une relation désintéressée de malade à malade, l’un qui informe l’autre de ce qui marche pour lui, des conseils donnés par tel grand ponte et de ce qui se fait de mieux (soi-disant), du dernier cri en matière de traitement.

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Les nouveautés sont-elles synonymes de progrès  thérapeutique ?

Et c’est ce dernier cri technique qui est assimilé par un grand public (qui n’a malheureusement aucune éducation à la santé, même pas des rudiments d’anatomie) à une meilleure qualité de soins. Alors qu’on sait que, surtout compte tenu de l’arrêt de l’innovation thérapeutique, les médicaments nouveaux sont loin d’être meilleurs ; ils sont simplement beaucoup plus chers, et le marketing a donc tout intérêt à les présenter comme des révolutions, pour cacher la triste vérité des pipelines vides.

Rappelons-nous le sort du Hygroton (chlortalidone) de la classe des diurétiques thiazidiques, meilleur traitement pour la majeure partie des hypertendus, à la fois du point de vue de la relation bénéfice – risques et du rapport coût – efficacité. Il a été retiré du marché parce qu’il était efficace et… trop bon marché et faisait donc de l’ombre à d’autres médicaments antihypertenseurs que le laboratoire Novartis vend bien plus cher… La firme a tenté par tous les moyens de marginaliser les résultats de l’étude de grande envergure ALLHAT, afin d’entériner les nouvelles molécules au détriment de la chlortalidone, comme je le rappelle dans cet article, puis dans celui-ci qui parle de la réévaluation de la même étude.

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Leaders d’opinion – « dealers d’opinion » : key opinion leaders. Et le troupeau de médecins reproduit le système, avec la complicité passive de patients grégaires

J’ai rendu compte dans cet article de l’analyse des tendances mettant en évidence ce marketing relationnel qui utilise les leaders d’opinion dont il optimise les prestations à l’aide de méthodes spécifiques développées afin de garantir le retour sur investissement. Ce sont eux qui permettent de verrouiller le système et de le reproduire, par un cercle de la référence, un cercle des « autorités » qui se connaissent et se citent, formant ainsi les références qui serviront d’ « argument d’autorité » lorsqu’il s’agira de désinformer les confrères qui sont en bas de la pyramide. Sur le cercle des « autorités », voir le livre de Petr Skrabanek et James McCormick, avec mes commentaires introductifs.

A chaque fois qu’il y a un scandale, les médecins se cachent derrière le petit doigt qui dit qu’ils ne savaient pas, que c’est aux autorités de les informer et d’évaluer les médicaments, etc.

Outre les très nombreuses prescriptions hors AMM, outre les prescriptions qui font gagner du temps à une « médecine libérale » – contradiction dans les termes – qui multiplie des actes pour gagner plus, outre les 97% des médecins qui reçoivent les visiteurs médicaux et ce qu’ils apportent, outre le refus de dépenser le moindre sou pour une formation continue indépendante, etc. – outre tout cela, de nos jours, on ne peut plus dire qu’il n’y a pas de sources d’information. Il suffit de vouloir s’informer, mais c’est certes moins plaisant que de gober ce qu’apporte les visiteurs médicaux – 330 par an en moyenne – qui offrent un repas au restaurant, un logiciel pour le petit dernier, « l’hospitalité » pour des congrès au soleil, une oreille compatissante après ces idiots de patients qui dérangent sa majesté le docteur pour un marmot qui a le nez qui coule (je cite un blog de médecin), et ainsi de suite…

Les médecins sont prompts à reprocher aux autres (autorités sanitaires, laboratoires…) d’être la source du problème, mais ils sont aussi prompts à refuser tout ce qui pourrait améliorer le système.

Les patients disent aussi qu’ils ne savaient pas, que ce n’est pas à eux de savoir. L’ignorance nous arrange. Mais n’est-ce pas aussi de notre responsabilité lorsque nous ne faisons rien et que nous nous laissons berner pour nous complaire dans l’attitude de l’éternelle victime ?

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Quid de la sous-notification chronique ?

Seulement 1% des effets secondaires, ou 5%, selon certaines estimations, seraient signalés aux instances de pharmacovigilance (AFSSAPS en France).

Notifier les effets secondaires aux autorités sanitaires, pour que celles-ci identifient le problème, c’est une obligation légale. Et pourtant, demander cela à un médecin, c’est mal vu. Remplir une déclaration de pharmacovigilance prend du temps, voyez-vous, et ce n’est même pas payé. (Dixit un médecin libéral, spécialiste secteur I, et pas des pires. Un autre – généraliste libéral – m’a avoué qu’en 14 ans de pratique, il n’avait jamais fait de déclaration. Il ne savait par ailleurs même pas qu’il dépendait géographiquement d’un centre régional de pharmacovigilance.) Il y a fort à parier que, comme pour le CAPI (contrat d’amélioration des pratiques individuelles), si demain les déclarations étaient rémunérées, il y en aurait pléthore, tout d’un coup. En tout cas, le généraliste qui n’avait jamais fait de signalement a signé très vite un CAPI et le défend… par des arguments soi-disant éthiques.

Pour ce qui est de la sous-notification, du désintérêt et de l’ignorance des médecins en la matière comme de l’absence de formation (20 heures de pharmacologie pendant toute la formation initiale…), il est édifiant de lire la Déclaration de l’ISDB sur la pharmacovigilance (cet article en rend compte. L’ISDB est l’union internationale des revues médicales indépendantes, dont fait partie ma principale référence : la revue allemande indépendante Arznei-Telegramm, 40 ans d’un combat sans faute au service des usagers).

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Consentement actif ou passif à tout ce qui rapporte ou conforte le statu quo…

Les « confrères » sont pour la plupart consentants, soit parce qu’ils veulent un jour faire partie de ce cercle des autorités, et que pour cela il ne faut pas fâcher les pharmas qui facilitent les carrières, soit pour l’argent, soit par solidarité ou parce que les visiteurs les tiennent par les tripes et les affects, comme le disait un critique.

Compte tenu de sa puissance de feu quand quelque chose ne lui convient pas, le système entier pourrait changer si le lobby médical le voulait. (Or les médecins ont refusé le testing sur l’acceptation de la CMU, la restriction de la liberté d’installation, la restriction des dépassements d’honoraires, bref, tout ce qui, dans la loi HPS,T allait dans le sens des usagers. Et leurs revendications sont presque exclusivement corporatistes, oubliant les patients.

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Et les médecins généralistes, gagnants des derniers combats corporatistes ? Quid de la responsabilité ?

Ils veulent qu’on parle beaucoup plus d’eux ces temps-ci, et sont même prêts à casser quelques spécialités pour revaloriser leur domaine. Alors il faut qu’ils assument aussi leurs responsabilités. Qu’ils réfléchissent à ces 25.000 euros par an et par généraliste que coûte la visite médicale – argent payé par la collectivité à travers le prix du médicament (voir les rapports de l’IGAS, en particulier celui sur l’information des médecins généralistes).

Qu’ils réfléchissent aussi aux 80% d’antidépresseurs qu’ils prescrivent pour ne pas perdre de temps avec une écoute d’ailleurs impossible en 10 minutes, aux anti-obésité prescrits parce qu’il est difficile de donner des conseils sur le mode de vie en 10 minutes. Qu’ils réfléchissent à l’abîme de plus en plus grand qu’il y a entre l’image qu’ils veulent donner et la pratique de la plupart d’entre eux. Ou encore au dédain et au mépris pour leurs patients que certains expriment sur leurs blogs, prenant même le risque que des lecteurs reconnaissent les personnes concernées (par exemple, « les yeux bovins » de telle patiente, une mésaventure (touchant à l’intime, qui plus est) d’une autre patiente me sont restés sur l’estomac).

Il y a certes beaucoup de critiques que nous, usagers, méritons. Moi compris, bien entendu. Mais n’est-ce pas aux médecins de nous éduquer en la matière ? Sinon, dans les conditions actuelles, comment s’étonner que des associations de malades tombent dans les bras de l’industrie, qui fait semblant de les prendre au sérieux, de leur donner une décision qui devrait leur appartenir ?

L’article du Pr Claude Béraud montre ce que devrait être une relation médecin – patient de qualité. Et la qualité est indispensable pour que le système puisse se débarrasser des influences néfastes, pour que ce duo médecin – patient évolue en toute indépendance, au service de la santé des patients et rien d’autre.

Non, non, les généralistes ne sont pas des boucs émissaires. Mais le CAPI (contrat d’amélioration des pratiques individuelles) et les 23 euros sans aucune contrepartie, sans aucun engagement pour la qualité des soins, ne passent pas. Ne passe pas non plus la volonté de casser la gynécologie médicale, la pédiatrie et la gériatrie pour les récupérer. Non pas que ces spécialistes soient blancs comme neige – ça, c’est encore un autre sujet. Mais j’ai connu un autre type de médecine et peux donc avoir un recul inhabituel en regardant certaines pratiques. Théoriquement, l’idée du médecin généraliste au centre des soins semble raisonnable. En pratique, c’est différent, dans un système de « médecin traitant » exerçant en « médecine libérale » courant après les actes et passant la moitié du temps de la consultation les yeux rivés sur la montre et à parler de lui / elle et ses difficultés financières, de sa générosité si sa dépasse de deux minutes. Quant on sait qu’autre chose est possible, qui coûte bien moins pour une meilleure qualité et fait avec humanité, cela est inacceptable: une pure et simple aberration, pour les médecins comme pour les usagers.

Je m’étonne que le syntagme « médecine libérale » ne soit pas perçu de suite comme une contradiction dans les termes, quelque chose qui ne devrait pas exister. Santé et enseignement devraient relever exclusivement du public, sans profit ni compétition, pour garantir un accès égal aux soins, une formation égale, une densité médicale égale sur tout le territoire, etc.

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Le courage d’aborder les questions qui fâchent, qu’on soit médecin ou usager. A commencer par les idéologèmes pris comme des absolus

Je reviens à l’exemple donné lors du débat, pour épingler un problème tout aussi épineux : certaines associations sont créées de toutes pièces par l’industrie pharmaceutique, par des laboratoires qui cherchent à faire autoriser tel ou tel médicament, en général pour donner l’impression qu’il y aurait une forte demande de la « base », de la population, pour tel remède. L’offre crée la demande. Et les pouvoirs publics ont beaucoup de mal à résister, surtout lorsqu’il s’agit de molécules censées agir dans les cancers ou éventuellement les prévenir (comme dans le cas des vaccins Gardasil et Cervarix). Le mot « cancer » semble déclencher des réactions irrationnelles, annihiler l’esprit critique.

Ca fait 50 ans qu’on a « déclaré la guerre » au cancer, 50 ans qu’on gobe n’importe quoi au nom de cette lutte-là, et les progrès sont très faibles. Par contre, l’industrie du cancer – parce que c’est devenu une vraie industrie (voir ces articles), avec beaucoup de profiteurs directs et indirects – engrange des profits considérables. Que ce soit les pharmas ou l’industrie des remèdes naturels, de l’homéopathie ou de la cohorte des méthodes alternatives, qui profitent de la détresse des gens. Et quid du taux très important de cancers d’origine environnementale – estimé à au moins 30% par certains auteurs – dont la médecine ne veut pas trop entendre parler?

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Les médecines douces et leurs tares symétriques. L’esprit critique doit s’appliquer à elles aussi

Pour ma part, je n’utilise pas la critique des pharmas pour cautionner la vente des produits « alternatifs »  (je ne vends rien, alors…) et n’oublie pas que ces branches-là ont elles aussi leurs conflits d’intérêts, sans parler des charlatans qui fleurissent et du placebo fort coûteux consistant à faire rembourser par la Sécurité sociale des pilules de sucre prescrites lors de consultations qui dépassent de beaucoup les 23 euros… Sans oublier non plus le passe-droits incroyable qu’est l’autorisation de mise sur le marché de remèdes dont aucun essai clinique ne vient prouver scientifiquement l’efficacité.

Ceux qui exigent que les médicaments de l’industrie pharmaceutique soient testés en long et en large, que les conflits d’intérêts soient éliminés, etc., ne peuvent être pris au sérieux que s’ils exigent la même chose pour les médecines dites « douces ». Et s’ils n’instaurent pas une véritable police de la pensée, déjà à l’œuvre en Grande-Bretagne, par exemple, où l’on ne peut même plus poser la question de l’efficacité de telle thérapie sans se voir poursuivi en justice par l’un des multiples avatars de la multinationale « douce » du Dr Mathias Rath. En matière de censure, cet empire-là fait tout aussi bien que les laboratoires pharma.

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Le rapport coût – efficacité, indispensable, y compris s’agissant de cancers et de maladies chroniques

Pourquoi y aurait-il des tabous, inaccessibles à l’analyse rationnelle, dans un système qui se veut scientifique et qui prend l’EBM (evidence-based medicine : médecine basée sur le niveau de preuve) pour le gold standard ? Même s’il faut bien reconnaître que l’EBM est loin d’être appliquée, et c’est ce que je rappelle toujours à ceux qui voudraient s’en débarrasser au nom d’une supposée intelligence collective qui surgirait par exemple de… forums de discussion peuplés de personnes dont la plupart n’ont même pas une vague idée de l’anatomie…

On met sur le marché des dizaines de biomédicaments – pour ne parler que d’eux – qui ne sont pas testés et dont l’efficacité n’est donc pas démontrée, mais qui sont vendus à prix d’or, parce qu’ils sont censés prolonger (dans quelques cas) de quelques semaines la vie des malades de cancers en stade terminal. J’ai souvent parlé des anticorps monoclonaux, dans les articles accessibles à partir de cette page.

Les rares voix qui osent questionner ces médicaments – la façon irresponsable de les homologuer et le prix exorbitant qu’ils coûtent pour un bénéfice non démontré et pour des effets secondaires très sévères – ces personnes ou institutions se voient traiter d’inhumaines et irresponsables, et je passe sous silence les noms d’oiseaux.

Le sénateur Charles Grassley  (Etats-Unis) en fait partie. J’ai popularisé son nom en France, pour son projet de transparence (Physician Payment Sunshine Act, voir ici ou encore ici et ici), sa lutte contre toute forme de conflits d’intérêts des médecins, pour le soutien aux lanceurs d’alerte et les enquêtes qu’il a lancées sur bon nombre de médicaments douteux. Son questionnement sur les dizaines d’anticorps monoclonaux comme sur l’utilisation de critères secondaires de jugement (surrogate endpoints), dont on sait qu’ils ne valent pas grand-chose selon l’EBM, lui a valu de faire les gros titres du genre « Grassley’s War on Cancer Patients » (Grassley fait la guerre aux patients souffrant d’un cancer)…

Le NICE britannique (National Institute for Clinical Excellence), qui devrait servir d’exemple à notre Haute Autorité de Santé pour son travail en matière d’évaluation des médicaments, comprenant le rapport coût – efficacité, s’est vu attaqué de toutes part pour les mêmes raisons, pour avoir osé refuser l’utilisation par le service public de certains de ces prétendus traitements du cancer et de certaines maladies chroniques.

Par ailleurs, le NICE risque de succomber sous les attaques, puisque des ennemis se liguent temporairement contre un ennemi commun, c’est bien connu… La décision sur l’utilisation et le remboursement de bon nombre de médicaments pourrait revenir en fin de compte aux 150 trusts de médecine générale et non plus au NICE. Chaque trust pourrait faire ce qu’il veut, en fonction de ses intérêts. Les usagers britanniques ont intérêt à ce que les généralistes mis – un peu trop – au centre du système s’y connaissent parfaitement bien dans toutes les spécialités… (Je reviendrai là-dessus).

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Pharmacommerce de la peur du côté des laboratoires. Faut-il répondre par le silence, pour ne pas faire peur en informant ?

Une lectrice de Pharmacritique me racontait la réaction qu’a récemment suscité une information qu’elle a voulu partager pour mettre en garde : elle a posté sur un forum Doctissimo – inutile de dire ce que j’en pense… – consacré au cancer du sein un lien vers mon dernier article informant que l’Avastin n’était plus autorisé en traitement adjuvant du cancer du sein (aux Etats-Unis, puisque la France ne réagit pas, comme d’habitude). La réaction a été significative et montre bien que, en l’absence d’éducation à la santé, les personnes souffrant d’un cancer sont prêtes à accepter littéralement n’importe quoi – et que les firmes pharmaceutiques profitent largement de cela.

La personne qui répond parle d’un risque d’hémorragie, qu’elle considère comme le plus ennuyeux et dit

que des hémorragies internes pouvaient survenir 3 à 4 ans (et même plus) après avoir « ingurgité » ce produit. (…) Normal en mon sens, normal dans le sens que ce produit est actuellement un produit « miracle » pour beaucoup d’entre-nous, même si les effets secondaires sont redoutables pour certains (je suis dans le lot avec plus de 20 séances de ce produit…). En ce moment je suis encore sous Avastin pour 12 séances, il n’y a plus beaucoup de médocs pour moi, alors….Tant que je suis debout je dis MERCI à ceux qui me soignent et « j’avale » mon poison bénéfique en espérant que….
Pour te dire Loca… que donner des infos « brut » de décoffrage est difficile à avaler pour certains malades, c’est un peu comme si tu tirais sur une ambulance… 

J’entends bien la souffrance, et pourtant, peut-on en rester là ? Ne sommes-nous pas responsables de ce qui est sur le marché, sachant que, quant à ce type de médicament, c’est de l’illusion chèrement payée, parce que les effets secondaires font que le très hypothétique prolongement de la vie d’un malade de cancer en stade terminal se fait dans la souffrance, et parce que les coûts cumulés de ces pseudo-traitements démoliront les assurances-maladie publiques. La question ne se poserait pas si ces médicaments permettaient de sauver des vies ou avaient un effet significatif et démontré.

Par-delà le cas des cancers, j’ai souvent entendu ce pseudo-argument : il ne faudrait pas parler des effets indésirables de tel médicament parce que cela fait peur aux gens…

C’est ce qui se dit sur les forums si chers à Dominique Dupagne, d’où est censée émaner l’intelligence collective, la « médecine 2.0 » qui se passerait des « médiateurs » comme lui ou comme moi… On suppose d’emblée, et les responsables associatifs interviennent parfois eux-mêmes pour l’affirmer sur ces forums, que les victimes ne sont que des cas isolés, ou alors que tel effet n’a rien à voir avec le médicament en question. Et puis on sait que ça n’arrive qu’aux autres… Puisque tout le monde n’aura pas les mêmes effets secondaires suite au même médicament, ou du moins pas de la même gravité, il vaudrait mieux ne pas en parler. De plus, les médecins savent ce qu’ils font et ils en parleraient s’il y avait un problème, général ou pour un patient en particulier…

J’ai vu de mes yeux cette réaction stéréotypée sur divers forums des associations de malades, où on est mal vu, si ce n’est discrédité ou banni, si on parle d’effets indésirables, d’informations qui ne cadrent pas avec ce que disent les leaders d’opinion membres du comité scientifique des mêmes associations – et consultants des labos… Et peu importe les preuves qu’on apporte ! Ce public-là est conditionné à ne croire que les leaders d’opinion dont tous les péchés sont absous d’avance.

  • Non, ne disons pas que le Lantus (insuline glargine) est suspecté de provoquer des cancers, parce que c’est très rare et ça fait peur aux diabétiques (voir l’article).
  • Ne disons pas que les analogues agonistes GnRH (Enantone, Décapeptyl, Zoladex, Synarel…) risquent de tuer plus que le cancer de la prostate lui-même, parce que ça fait peur… Ou alors que les mêmes Enantone et Cie, administrés inutilement dans des maladies gynécologues bénignes (endométriose, fibromes en préopératoire et même des vagues « déséquilibres hormonaux » ou inflammations pelviennes non diagnostiquées, etc.) risquent de provoquer des effets secondaires qui peuvent être irréversibles, voire mortels. Ca fait peur. Et ça pourrait dissuader certaines femmes de faire don de leurs ovocytes, si elles savaient à quoi elles s’exposent dès la première dose: à une apoplexie hypophysaire, par exemple, même avec les doses réduites et à libération immédiates utilisées en procréation médicalement assistée.
  • Pendant des années, j’ai été quasiment la seule – en tout cas la première en France – à mettre publiquement en cause Avandia (rosiglitazone), largement prescrit avant d’être piteusement retiré en 2010, comme si la nouvelle de ses graves effets secondaires cardiovasculaires était toute fraîche… (Plusieurs articles accessibles à partir de cette catégorie réunissent les notes sur les médicaments utilisés dans le diabète: « Avandia, Actos, insulines, Lantus« …)
  • Ne disons pas que le  Fosamax° (alendronate) et tous les médicaments de la classe des bisphosphonates, le neuroleptique  Zyprexa° (olanzapine) et bien d’autres font l’objet de milliers de plaintes aux Etats-Unis, parce que ça fait peur. (Voir entre autres les articles des catégories « Iatrogénie, effets secondaires » et « Traitements de l’ostéoporose, bisphosphonates« )

Il y a même des blogs qui ont titré là-dessus (!) : « Pharmacritique va-t-il trop loin ? » Pharmacritique utiliserait la peur, manipulerait par la peur, chercherait le scoop, le sensationnalisme, etc. Dites donc, quel honneur, de donner tellement d’importance à ce blog et à ma prose !

La peur est le levier principal de l’industrie pharmaceutique, lorsqu’elle diabolise le cholestérol pour vendre des statines, agite le spectre de maladies au demeurant pas endémiques qui deviennent du jour au lendemain des problèmes de santé publique, tels le cancer du col de l’utérus pour vendre le Gardasil (ou le Cervarix), lorsque la même industrie prétend faire de la prévention en traitant des facteurs de risque comme s’il s’agissait de maladies, baisse les valeurs normales de certains paramètres pour que des centaines de millions de personnes bien-portantes se retrouvent étiquetées (pré-)diabétiques, (pré-)hypertendus ou se voient traitées pour une éventuelle future ostéoporose, etc. D’où mon syntagme : pharmacommerce de la peur.

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Christian Lajoux en grand résistant à la chasse aux sorcières faite par des gens au passé douteux…

Pour certains, il vaudrait mieux ne pas savoir et donc se fier à ces autorités d’insécurité sanitaire qui nous ont tellement bien défendus que nous n’avons même pas entendu parler d’une seule victime du Vioxx… Comme si les Français avaient une conformation anthropologiquement différente des autres, qui les protégerait des poisons qui sont mortels à l’étranger…

Fions-nous aux laboratoires aussi, puisque Christian Lajoux a commencé son intervention en disant à quel point ils guérissent ou soignent tous les maux ou presque. Lors d’un débat radiophonique, le même patron affirmait que les labos travaillent pour l’intérêt général (!).

C’est le même Christian Lajoux qui, comme je le lui ai rappelé juste avant l’émission, considérait dans une interview accordée en juillet 2009 (largement commentée et citée dans cet article) que le système fonctionne globalement bien. Il incluait bien entendu les autorités sanitaires dans ce satisfecit, ce qui, en soi, devrait suffire à susciter la méfiance des usagers… Car si le système satisfait les industriels, c’est plutôt mauvais signe pour la santé des individus.

Selon le PDG de  Sanofi-Aventis  (France) – labo qui s’est illustré par son « éthique », par exemple en  fraudant l’assurance-maladie des handicapés et des Américains les plus pauvres (lire ici) – on ferait un « procès en sorcellerie » aux pharmas, un procès avec des arguments moyenâgeux, éculés. Christian Lajoux dit que les auteurs de ces critiques seraient des gens aigris, qui se sont compromis par le passé. Sous-entendu : ils ne sont pas dignes de confiance, ils ont des motivations personnelles cachées et de bas étage, rien à voir avec le noble travail des laboratoires. Le Médiator nous a donné un énième exemple éloquent de ce travail « dans l’intérêt général »…

A en coire ce qu’il dit et fait, nous pourrions dormir sur nos deux oreilles. Comme pour exemplifier encore et encore ce pantouflage qualifié de revolving doors (portes tournantes entre public et privé) dans les pays anglo-saxonx, Christian Lajoux est entré au conseil d’administration de l’INSERM, au titre de « représentant du monde du travail ». Et j’ai appris que, suite aux partenariats public – privé tellement chers à Nicolas Sarkozy et aux patrons, Sanofi ferme des unités de production, puisque désormais il fait faire à la recherche publique ce pourquoi il dépensait un peu de son argent : des applications immédiatement rentables de connaissances qui ne progressent plus, parce que la recherche fondamentale n’est pas continuée.

Pour ne donner qu’un exemple, au lieu de découvertes menant à un progrès thérapeutique, nous aurons une énième version de ces  médicaments anti-Alzheimer (Aricept, Réminyl, Exelon) qui ne sont pas efficaces mais se vendent très bien. Et Sanofi, qui n’avait pas encore accédé à ce gâteau-là, gardera bien sûr l’intégralité et l’exclusivité des brevets…

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En guise d’observation finale

Il est impossible ne serait-ce que d’évoquer dans un seul article toutes les dimensions et méthodes de ce ghost management  pharmaceutique – cette gestion invisible, mais omniprésente et totale de toute la filière du médicament et de l’information qui va avec. Mais une chose est certaine :

On revient toujours aux profits. Ce qui fait que tous les discours lénifiants de Christian Lajoux ne changeront rien à la dégradation progressive de l’image de cette industrie. Les citoyens finiront par prendre conscience du fait que le Médiator, le Vioxx, le Zyprexa, le Distilbène, le Baycol et d’autres sont effectivement des épiphénomènes d’un problème structurel majeur.

Ils comprendront que c’est le Pr Peter Schönhöfer – pharmacologue rédacteur d’Arznei-Telegramm qui a raison: la corruption et les conflits d’intérêts sont un problème structurel dû à l’oganisation actuelle du système de santé et de soins. Si l’on veut une sécurité sanitaire et des soins de qualité, c’est une refonte radicale de l’ensemble qu’il faut exiger, avec une déontologie de l’expertise permettant l’élimination des conflits d’intérêts, la prise en compte de l’expertise citoyenne ainsi qu’une législation protégeant les lanceurs d’alerte et permettant de poursuivre en justice – et de dissuader – tout dérapage des industriels. Une proposition de loi sur l’une de ces dimensions – l’expertise et l’alerte – a été formulé par la Fondation Sciences Citoyennes. Si le LEEM travaille effectivement dans l’intérêt général, Christian Lajoux devrait être le premier à la promouvoir. Xavier Bertrand aussi, au vu de son discours annonçant en termes grandiloquents ce qui se termine en une mascarade qui permettra aux industriels de renforcer leur emprise, puisqu’ils pourront dire qu’il y a eu un débat public et un Grenelle du médicament…

Elena Pasca / Copyright Pharmacritique

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16 COMMENTAIRES

COMMENTAIRES

  • Félicitations. Votre article mérite une plus grande audience voire une publication dans un grand journal quotidien mais qui oserait ? Y avez vous pensez?

    Vous avez organisé deux séminaires d’ETAL; Avez vous réalisé des vidéos ou des comptes rendus que nous pourrions lire ou voire ?

    Continuez ainsi et si vous organiser des FMC dîtes moi le pour que je continue de me soigner 😉



    PS : il manque semble t’il le mot « être  » dans votre phrase :`qu’il ne fallait pas suivre Christian Lajoux sur ce terrain-là, parce que nous ne pouvions pas à la hauteur. »Écrit par : Gyuran 11h55 – jeudi 20 janvier 2011Répondre à ce commentaire

  • Je ne suis pas si sûr que cette affaire se révèle positive finalement. Les scandales n’éclatent qu’au moment propice, par une presse pratiquement aux ordres, et quand bien même, les politiques peuvent surfer sur n’importe quelle vague de marée noire et fétide et s’en sortir blancs comme neige.

    Un peu de « science fiction »…
    Nos politiques vont se refaire une virginité au dépend de Servier (bonjour l’amitié entre requins), et je ne m’étonnerais pas qu’un jour proche, Servier bien affaibli par cette tuile soit absorbé, non… euh… un grand labo français  » vole au secours » de Servier, genre un labo copain avec les Sarko.
    Puis au frais du contribuable on indemnisera, pas grand monde, car la plus grande part des prescriptions l’ont été hors AMM, et Dame Sécu prendra tout ça en charge, et Hop! une belle opération financière au passage.
    Au final tout ça se fera au frais du contribuable ou du cotisant sécu.
    Mais c’était juste un peu de « science fiction »

    Et quel bol ils ont ses véreux, Bachelot et son vaccin pourri a été sauvée par la catastrophe haïtienne, et à peine Médiator éclate que c’est la révolution en Tunisie, en Egypte.

    PS : si vous avez pris du Pondéral ou de l’Isoméride, c’est la même cochonnerie que Médiator. Byetta et Actos (pour le diabète) sont au moins aussi dangereux que ces produits.
    Nexen pour des hépatites graves et mortelles etc, etc.
    La liste est longue, des vaccins chers et quasi inutiles, et dangereux, déjà signalés par Elena Pasca, Rotarix (dont une gigantesque étude dans les pays du tiers monde a montré son inefficacité sur la mortalité), vaccin contre la varicelle (au risque de déplacer les varicelles à l’âge adulte plus graves)Écrit par : MGFRANC 09h50 – dimanche 30 janvier 2011Répondre à ce commentaire

  • Bonjour Elena,

    C’est rarissime de lire un tel article. J’ai suivi quelques liens, pas encore tous. Pharmacritique est une mine d’or et je me ferai un plaisir de faire de la spéléologie ;-))
    Je rejoins CMT : chapeau ! Pour cet article et pour tous les autres.
    Gyuran a raison : vous devriez publier dans les journaux largement diffusés. Avez-vous pensé au Monde diplomatique, qui ne se limite pas à des articles d’une demi-page ?
    Longue vie à Pharmacritique, une bouffée d’oxygène pour ne pas nous noyer dans la boue qui s’est infiltrée partout dans le petit monde médico-pharmaceutique : petit par la taille, mais pas par les enjeux financiers…
    Restez comme vous êtes, sans concessions, sans copinages, vous n’en serez que plus crédible !
    Bien cordialement.

    DocD (médecin généraliste, libéral par la force des choses).Écrit par : DocD 12h35 – dimanche 30 janvier 2011Répondre à ce commentaire

  • Bonsoir ELENA je vous remercie pour cet article qui est une fois de plus excellent

    ……………..Les patients disent aussi qu’ils ne savaient pas, que ce n’est pas à eux de savoir. L’ignorance nous arrange. Mais n’est-ce pas aussi de notre responsabilité lorsque nous ne faisons rien, que nous nous laissons berner de la même façon pour nous complaire dans l’attitude de l’éternelle victime ?……………………….

    Effectivement l’ignorance arrange beaucoup de personnes c’est facile et cela évite de se poser des questions
    Le changement viendra de nous, personne ne nous oblige à prendre des médicaments sans avoir auparavant vérifié sur internet si il y a des problèmes ou pas.
    Hier un ami m’a dit qu’il prenait du RIVOTRIL pour une dépression !!!!!!!!!!! je lui ai envoyé des articles sur ce sujet mais cela ne va probablement rien changer.

    Chacun est libre mais il ne faut pas se plaindre après c’est trop facile
    Donc nous sommes également responsables, je pars du principe qu’il ne faut pas prendre pour argent comptant tout ce qu’un médecin dit.
    Concernant le MEDIATOR lorsqu’on voit le nombre de prescriptions hors AMM comment peut on encore faire confiance ……………………


    Cordialement
    MartineÉcrit par : Martine 20h00 – jeudi 10 février 2011Répondre à ce commentaire

  • Bravo pour votre courage et votre connaissance du sujet.

    Que dire aussi des AMM concernant le fameux AZT .
    Prescrit à l’origine, pour traiter le cancer , puis retiré du marché, puis réintroduit pour traiter le sida au début en tant que monothérapie, il est resservi depuis l’arrivée des trithérapies, en 1996. Connu pour sa toxicité (tête de mort figurant sur le flacon) il crée l’apoptose des cellules, rien que ça !
    Ce poison, n’a jamais fait l’objet d’une pharmacovigilance, ( et ne figure pas dans la liste des médicaments-poisons à surveiller) c’est un comble !

    Voir le film […] pour comprendre l’industrie du sida


    [Mention publicitaire supprimée par Pharmacritique, conformément à la politique du blog. Je ne cautionne pas vos vues sur ce que vous appelez « l’industrie du sida », parce que je sais que le terme n’est pas innocent. Il renvoie à un mouvement structuré auquel je ne permettrai pas de se manifester sur Pharmacritique].Écrit par : Herman 23h05 – jeudi 10 février 2011Répondre à ce commentaire

  • A Herman

    Suite de ma mention à la fin de votre commentaire, expliquant la suppression d’une mention publicitaire.

    Merci de ne plus poster ce type de références. Et pas non plus des propos extrêmes tout droit issus d’un courant douteux qui tente de se faire de la publicité et de recruter en se présentant d’abord sous des avatars plus respectables. La période est propice…

    Si vous n’en tenez pas compte, tout le commentaire sera effacé et vous ne pourrez plus poster.

    Je ne cautionne pas les propos extrêmes qui circulent actuellement à propos du HIV et du SIDA. Ca ne passera pas sur ce blog, comme ne passent pas non plus les publicités plus ou moins directes pour la scientologie, pour les guérisseurs de toute sorte et les vendeurs de produits miracle, pour des idéologies extrémistes du genre conspirationniste, etc.

    Mes critiques restent rationnelles, et j’entends que le blog le soit aussi. Pharmacritique ne deviendra pas un véhicule de rumeurs, d’idéologèmes, de peurs irrationnelles et de convictions non fondées en raison. Ni un panneau publicitaire pour qui que ce soit.

    La critique argumentée de l’AZT est une chose, mais ce n’est pas ce que vous faites. Car parler de « l’industrie du sida » en donnant ce film pour exemple et explication, c’est tout autre chose.

    Votre « argumentation » fort sommaire est assez typique de ce qu’on sert aux personnes qui n’ont aucune connaissance, même élémentaire, du sujet. Des mots qui font peur…

    « Apoptose des cellules, rien que ça », dites-vous.

    Comment voulez-vous tuer un virus? Ou une tumeur, etc.? En laissant leurs cellules vivantes ou en les amenant à mourir (« apoptose »)?

    On est où, là? Au pays des bisounours? Où le HIV n’existe pas? Ou alors où on peut guérir le SIDA par l’alimentation / la prière / la conversion / la vitamine C ??

    J’ai fait quelques recherches sur le mouvement qui rassemble plusieurs branches – qui se chamaillent entre elles pour la légitimité, etc. – de cette énième bataille visant à dire que le HIV n’existe pas, que ce n’est pas le SIDA (qui n’existerait pas non plus) qui tue, mais les médicaments… Les diverses variantes de ce mouvement en arrivent aussi à cautionner le fait qu’une personne ne se protège pas délibérément et transmet le virus. Pas de problème, puisqu’il n’y aurait rien à transmettre… On tombe aussi dans des argumentaires religieux et idéologiques, aux odeurs nauséabondes.

    *
    Je ne connais que trop bien la stratégie publicitaire de tels mouvements, consistant à épuiser l’interlocuteur par des tonnes de commentaires, (pseudo)références, films, etc. et n’entrerai donc pas dans cette polémique stérile.

    Il vaut mieux éviter.
    Libre à vous de parler de censure. C’est peut-être là que réside, en fin de compte, le « courage » dont vous parliez. De prendre ce risque-là (aussi) et de ne pas céder à la facilité des peurs irrationnelles et du rejet en bloc.

    E. Pasca / PharmacritiqueÉcrit par : Pharmacritique 02h15 – vendredi 11 février 2011Répondre à ce commentaire

  • Dommage, ce lien traitait justement des conflits d’intérêt, objet de votre blog, dans l’en tête :
    Expression libre sur la santé et tous les lobbies et conflits d’intérêts qui la mettent en danger. Les rapports entre industrie pharmaceutique, médecine et usagers sont sous la loupe critique…

    Ma question est donc : Comment voulez informer les citoyens et aiguiser leur sens critique si vous même censurez !

    Bonne chance tout de même pour votre combatÉcrit par : Herman 15h25 – vendredi 11 février 2011Répondre à ce commentaire

  • Merci en tout cas pour toutes ces informations. C’est très louable de ne pas prendre parti, mais qu’allons-nous faire, nous, médecins généralistes pour soigner toute cette population avec tous ces médicaments ( et d’autres par la suite?) qui vont être surveillés, interdits, qui font peur?
    Difficile hein?
    Encore un patient qui s’est mis en colère contre moi il y a trois jours  » comment docteur je veux faire quelque chose pour ma santé en arrêtant de fumer et vous me refusez le champix! » J’ai dû lui montrer les effets secondaires et l’orienter vers une médecine parallèle en plus des patchs de nicotine.Écrit par : docteur Vincent 20h45 – lundi 14 février 2011Répondre à ce commentaire

  • Les mots ont été lâchés : « escroquerie à la Sécurité Sociale ! »
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/08/05/mediator-le-parquet-veut-poursuivre-servier-pour-escroquerie_1556714_3224.html

    Les loups ont été lâchés, j’en arrive à plaindre Monsieur Servier, car ce n’est pas mieux pour les autres laboratoires, mais il est seul dans la tourmente, choisit pour protéger les plus grands peut-être.

    Comment la Sécurité Sociale peut-elle connaitre le montant exact des boites de Médiator remboursées, puisqu’elle ne conserve aucune archives ? C’est ce qui a été répondu aux femmes qui ont pris Agréal par la Sécurité Sociale…… ! Comment évalue-t-on dans ce cas là ?

    Servier est l’homme à abattre, il est âgé, son laboratoire n’était pas à vendre…..il a certes fauté pour se maintenir au niveau des grands sans se faire racheter, mais les autres sont loin d’être blancs et leurs sols sont jonchés de cadavres. Quel acharnement !

    Mais que fait donc le ministre délégué à la Sécurité Sociale aux joyeuses fêtes du LEEM (il n’est pas le seul d’ailleurs) ?
    http://www.dailymotion.com/video/x23dxw_les-lobbies-a-l-elysee-1-5_news#from=embed%5B/dailymotio

    La vidéo est sauvegardée, il arrive qu’elles disparaissent très vite ou qu’elles soient modifiées. J’en avais une dans laquelle un lobbyiste disait « je retourne à l’Assemblée Nationale, on doit parler de grippe aviaire », la deuxième partie de la phrase a disparu !
    Elle datait d’avant « la pandémie » mais j’étais tombée dessus pendant « la pandémie. »Écrit par : Chantal 20h55 – samedi 06 août 2011Répondre à ce commentaire

  • Bonjour Eléna,

    A l’époque où j’ai trouvé ces vidéos (simple recherche pendant la « pandémie »), je ne savais pas sauvegarder les vidéos ; maintenant je sais, mais je ne peux les envoyer qu’en pièces jointes. Certainement pas le bon programme.

    Mais je me souviens avoir mis cette vidéo sur un forum de la grippe sur Doctissimo, quelques temps après elle état inactive.

    Monsieur Eric Verhaeghe, dans son livre « Jusqu’ici tout va bien ! « Enarque, membre du Médef, président de l’Apec, je jette l’éponge ! » raconte qu’au début de la chute de Lehman Brothers, tous les dirigeants français souhaitaient qu’une bonne grippe arrive. Dieu était du côté des dirigeants…. !
    Il s’est, lui-aussi, volatilisé fin avril, malgré un blog qui attirait de nombreuses personnes, http://www.eric-verhaeghe.fr/ et le début d’un roman dont nous recevions les écrits par mail http://infernalesurprise.com/

    Une étrange disparition.. il avertissait quand il devait s’absenter !

    Cordialement.Écrit par : Chantal 20h55 – lundi 08 août 2011Répondre à ce commentaire

  • Le malheur des uns ou plutôt d’UN, fait le bonheur d’un autre :

    8 avril 2010

    Sanofi-aventis et CureDM concluent un accord de licence exclusif mondial pour une thérapie innovante régénérative dans le diabète

    25 juin 2010

    Sanofi-aventis et Metabolex signent un accord de licence exclusif mondial sur un antidiabétique oral innovant pour le traitement du diabète de type 2

    1er juillet 2010

    Sanofi-aventis et la JDRF signent un partenariat pour améliorer les traitements actuels et rechercher des thérapies visant à guérir le diabète de type 1

    21 décembre 2010

    Sanofi-aventis acquiert auprès d’Ascendis Pharma une licence mondiale sur une technologie de libération de médicaments dans le diabète et ses troubles associés

    http://www.sanofi.com/partenaires/nos-partenaires/nos-partenaires.aspx

    Le Médiator était bien un antidiabétique il me semble ; le hasard fait quand même bien les choses, surtout en matière de médicaments et de maitre du monde….

    Sortie du livre d’Irène Frachon, juin 2010 – Etrange coïncidence ! Juste un petit rapprochement avec GSK -médecin investigateur et collaboratrice ponctuelle non rémunérée (comme le député et le pharmacien cité dans un autre de mes commentaires)
    http://www.prescrire.org/Docu/Archive/docus/FrachonPiluleOrPrescrire2011.pdf

    Quant à Me Charles Joseph-Oudin, il serait le neveu de Catherine Hill, membre du conseil scientifique de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps).
    http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:IBrbf8V5uuIJ:www.gerardbapt.info/index.php%3Foption%3Dcom_content%26task%3Dview%26id%3D586%26Itemid%3D67+Catherine+Hill+et+Me+Joseph-Oudin&cd=7&hl=fr&ct=clnk
    Information ayant disparu par la suite :
    http://www.gerardbapt.info/index.php?option=com_content&task=view&id=586&Itemid=67


    Mais je sais de source sûre (pharmacie, infirmière d’hôpital), que les femmes quittaient leur médecin traitant si il ne voulait pas leur prescrire du Médiator pour maigrir pour se diriger vers celui qui prescrivait…. !

    Il y a aussi une profession dont on ne parle jamais, et qui sait que les femmes sont très demandeuses de produits amaigrissants (surtout s’ils sont remboursés par la Sécurité Sociale)….. les pharmaciens !

    Je suppose que dans un laboratoire, c’est le pharmacien qui gère la composition des produits pharmaceutiques et, comme toute secrétaire, je sais que peu d’informations remontent à la Direction ; elles sont dispatchées vers les chefs de service en fonction du problème à traiter….

    Lorsque j’ai dit à mon pharmacien que j’allais porter plainte, il a rigolé, en me répondant « vous pouvez toujours essayer ! »

    Médecins et pharmaciens font bloc lorsqu’un produit de santé cause des dégâts, j’ai pu le constater.

    Je vais aller m’offrir un bon polar, dans lequel on ne parle ni politique ni industrie pharmaceutique.Écrit par : Chantal 02h45 – lundi 12 septembre 2011Répo

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