Roland Gori, Marie-José Del Volgo, « La Santé totalitaire : Essai sur la médicalisation de l’existence », Denoël 2005, 22 euros.
« (…) Devenue technico-scientifique, la médecine occidentale redouble cette expropriation du corps [déjà opérée par la maladie], puisque « c’est en tant qu’objet que le corps du malade se trouve pris en charge », la subjectivité du malade étant tenue à l’écart : ce que Foucault appelait la médicalisation des conduites. Il s’agit en fait, d’une véritable idéologie médicale dont le but est de prescrire des comportements sains, grâce auxquels nous serions responsables de notre état de santé, et donc coupables de nos maladies, jusqu’à l’intériorisation de ces normes. Tout en étant dessaisis de nous-mêmes en cas de traitement : voilà l’hypocrisie et le paradoxe que pointent les auteurs. (…) La psychiatrie nord-américaine est en passe d’imposer une approche exclusivement médicamenteuse de la souffrance psychique : « La maladie psychique devient ce que la molécule soulage. » Ainsi, tout en prétendant discréditer la psychanalyse, cette psychiatrie répond aux demandes d’industries pharmaceutiques particulièrement rentables. Les conséquences de ce « technico-puritanisme états-unien » ? Une santé présentée comme produit de consommation, budgétée et progressivement privatisée, des hôpitaux classés, une soumission aux lobbies pharmaceutiques, une psychiatrie réduite à l’usage de psychotropes pour limiter les « déviances » et autres « troubles du comportement ».
L’intégralité du compte-rendu par Nicolas Mathey est dans l’Humanité du 16 avril 2005.