Pharmacritique avait repris des caricatures de Mike Adams montrant l’effet nocif de la surconsommation humaine (et animale) de médicaments sur l’environnement puis sur la santé des animaux et des hommes.
Toute la filière du médicament – de la production à la consommation et au retour dans la nature sous forme de pollution – crée des risques toxiques pour l’environnement. Ce qui veut dire une double toxicité pour les hommes. Le meilleur exemple est celui des « substances à action endocrine (SAE) » ou « perturbateurs endocriniens », sur lesquels nous reviendrons.
Voici un texte de Sharon Batt – chercheuse en santé, militante à l’Action pour la protection de la santé des femmes -, intitulé La boucle bouclée : les médicaments, l’environnement et notre santé, qui illustre bien le cercle vicieux de toxicités multiples et croisées résultant de nos habitudes de surconsommation de produits chimiques, et surtout de médicaments.
PPSP = produits pharmaceutiques et produits de soins personnels
Quelques extraits du texte de Batt : « (…) Au Canada et aux États-Unis, des analyses ont montré que les cours d’eau nord-américains contiennent des traces d’antibiotiques, d’analgésiques, d’anti-inflammatoires, d’hormones, de tranquillisants et de médicaments contre le cancer (chimiothérapie), l’épilepsie et le cholestérol sanguin. De même, on a trouvé des traces de médicaments dans l’eau de robinet de certaines communautés canadiennes. (…) D’autres produits chimiques d’origine alimentaire et pharmaceutique, notamment des additifs et des articles de toilette, avaient également été découverts, tout comme des produits chimiques vétérinaires et agricoles. Les nouveaux produits issus de la biologie, des thérapies génétiques et des organismes génétiquement modifiés (OGM) pourraient un jour se retrouver dans cette « soupe chimique ». Si leurs conséquences sur la santé humaine demeurent inconnues, les malformations observées dans le système reproducteur d’organismes aquatiques montrent clairement que certains produits chimiques contaminant l’environnement ne sont pas inoffensifs, malgré les très faibles concentrations détectées3 (…)
Nous affirmons ici que la stratégie la plus rentable et la plus favorable pour la santé de tous demeure la prévention : réduire les mauvais usages, la surutilisation et l’abus des produits pharmaceutiques se traduira par une amélioration de la santé et une économie de coûts. Dans le même ordre d’idées, il est plus écologique et économique de réduire l’énorme quantité de médicaments inutilisés et d’éliminer en toute sécurité d’inévitables excès de médicaments que de chercher à filtrer ceux-ci dans l’eau une fois le mal fait. (…)
On peut faire beaucoup dès maintenant et à court terme. Une certaine utilisation des médicaments est nécessaire à la bonne santé, mais bon nombre d’utilisations sont inadéquates et néfastes. Il faut mettre un terme aux pratiques des entreprises qui consistent à promouvoir une utilisation des médicaments qui ne s’appuie pas sur des données scientifiques. C’est le cas de la publicité directe aux consommateurs60 , et les séminaires à caractère commercial qui visent à encourager les emplois non conformes. Il faudrait multiplier les initiatives d’éducation visant à promouvoir la santé par une meilleure alimentation61. (…)
« Au mieux, la recherche sur l’évaluation toxicologique [sur laquelle est centrée la loi canadienne] est une activité à long terme. Mais en la plaçant au cœur du programme scientifique chargé d’examiner la présence de PPSP dans l’environnement, on exclut ou on marginalise d’autres recherches capables d’aboutir à des mesures immédiates et à moyen terme. À cet égard, Daughton souligne le fait bien documenté que pauvreté et malnutrition contribuent davantage à la mauvaise santé que l’absence de médicaments47. Si l’on réduisait certaines utilisations des médicaments, on améliorerait les résultats pour la santé. Au lieu d’objectifs étroitement techniques, il propose un cadre de promotion de la santé qui encouragerait l’industrie et le public à établir un consensus et à adopter un état d’esprit culturel favorable à la « responsabilité environnementale holistique ».
Grâce à une approche multidisciplinaire, on pourrait élargir le programme scientifique et le sortir du cadre de la chimie analytique48. En outre, un ensemble de principes cohérents et scientifiquement valables permettrait alors d’orienter l’emballage, la distribution et la fourniture de PPSP, et l’on pourrait adopter rapidement bon nombre de ces principes49. Par exemple, il serait possible de réduire la posologie en s’appuyant sur des études montrant que la dose efficace de certains médicaments peut être inférieure à ce qu’on croyait. La réduction des doses entraînerait alors la réduction des effets indésirables, dont la mortalité, et minimiserait le potentiel d’effets sur l’environnement50. Une enquête sur l’élimination des médicaments a estimé que le coût annuel du gaspillage de médicaments, en Ontario, s’élevait à plus de 40 millions de dollars et était attribuable, en bonne partie, aux personnes âgées, en majorité des femmes51. D’autres études ont montré que la durée de conservation de certains médicaments était supérieure à la date de péremption figurant sur l’emballage (dans des conditions d’entreposage idéales), d’où des économies substantielles sans risque pour la santé52. Les mêmes principes scientifiques pourraient guider les actions des consommateurs. Comme le dit Daughton, certaines actions exigeraient peu de recherche, d’autres obligeraient à revoir les lois e
t règlements relatifs au recyclage et à l’élimination des médicaments et d’autres encore demanderaient des recherches plus approfondies. (…)
Remplacer les interventions pharmaceutiques habituelles par des approches complémentaires et parallèles, et les ingrédients synthétiques entrant dans la fabrication des produits de soins personnels par des substances qui existent à l’état naturel, pourrait avoir des conséquences appréciables, selon le D r Warren Bell53. Bon nombre d’approches parallèles n’ont aucune incidence sur l’écosystème (ex., thérapies manuelles, méthodes traitant le corps et l’esprit) et certaines ont des effets minimes (ex., homéopathie, modification du mode de vie). D’autres entraînent probablement des effets limités ou, du moins, supposent la simple redistribution de composés connus de la biosphère (ex., plantes médicinales, sels d’Epsom, suppléments et traitements vitaminiques et minéraux), eux-mêmes souvent considérés comme nettement bénéfiques ou neutres », explique le D r Bell. Une meilleure sensibilisation aux effets environnementaux des PPSP servirait peut-être de catalyseur à l’examen des effets thérapeutiques et environnementaux des médicaments complémentaires, dont certains sont hautement bioactifs, notamment les plantes médicinales et les suppléments nutritionnels54. »