Le syndicat américain de l’industrie pharmaceutique (PhRMA, homologue du LEEM français et de l’EFPIA européen) a annoncé en juillet 2008 la mise en place d’un code révisé du marketing, censé régir l’interaction des firmes avec les professionnels de santé, qui prendrait effet en janvier 2009. Une lecture attentive montre que c’est un écran de fumée et que, comme le dit le New York Times, en donnant des exemples de psychiatres leaders d’opinion inféodés aux firmes, le mélange des genres et les liens financiers ayant le plus de conséquences délétères ne seront nullement remis en cause. Plus ça change, plus c’est la même chose.
Selon PhRMA, le code permettra de supprimer les petits cadeaux tels les gadgets portant des logos, ainsi que les à-côtés divertissants, les repas et autres loisirs payés qui n’auraient pas de rôle éducatif ou informatif. (Comme si des rémunérations « éducatives » pouvaient exister…). Le marketing industriel devrait se faire en conformité avec « les standards éthiques les plus exigeants »… Cela nous rappelle forcément le code d’éthique, non, carrément de déontologie (sic), du LEEM et de l’EFPIA, lui aussi volontaire, et dont nous avons saisi l’essence profondément morale dans ce dessin.
Une quarantaine de firmes ont déclaré vouloir appliquer ce code révisé du marketing. Vous pouvez apprendre les détails en suivant les liens. Il ne faudrait pas oublier que ce code est volontaire, donc nullement obligatoire… De plus, la lecture de cette nouvelle version de poudre aux yeux montre que les moyens les moins productifs d’influence seront retirés, mais que PhRMA gardera les financements de la formation médicale continue, la possibilité pour les visiteurs médicaux d’apporter des repas aux cabinets ou dans les hôpitaux, les honoraires payés aux médecins pour des activités de consultants, de membres des comités scientifiques ou de pilotage, etc. Apparemment, cela ne contredit pas « l’engagement en faveur d’une interaction responsable avec les professionnels de santé »…
En tout cas, la contradiction n’a pas échappé au New York Times, dont l’éditorial du 4 janvier s’intitule « No mugs, but what about those fees ? » (Plus de gadgets, mais qu’en est-il de toutes ces rémunérations ?)
Interdire les babioles portant des logos et tout ce qui peut induire une influence subliminale sur les prescripteurs est une initiative qui économisera autour d’un milliard de dollars à l’industrie, tout en lui permettant de redorer son blason sans remette en cause les moyens d’influence les plus efficaces, alors que ce sont ceux-là qui ont les conséquences les plus néfastes sur le circuit de l’information médicale et la pratique de la médecine.
On l’a encore vu lors des récents scandales autour d’experts tels Joseph Biedermann ou Charles Nemeroff, en position de faire augmenter fortement les chiffres de vente des médicaments des firmes qui les payent, tout comme de produire une désinformation massive quant aux critères de telle maladie et à sa fréquence. Biedermann, par exemple, est directement et indirectement responsable d’une croissance exponentielle (40% en moins de 10 ans) des diagnostics de trouble bipolaire chez l’enfant et donc de l’utilisation massive des antipsychotiques atypiques. Ce n’est que l’œil inquisiteur du sénateur Charles Grassley qui a découvert l’explication : 1,6 millions de dollars de rémunérations industrielles non déclarés…
L’histoire de Biedermann est commentée dans un article en date du 6 juin 2008 du New York Times, intitulé « Researchers Fail to Reveal Full Drug Pay » (Des chercheurs omettent de déclarer le montant de leurs rémunérations par l’industrie). Quant aux conflits d’intérêts de Charles Nemeroff, découverts par Grassley et son équipe, ils sont exposés dans l’article du 4 octobre 2008 du même journal : « Top Psychiatrist Didn’t Report Drug Makers’ Pay » (Un grand ponte de la psychiatre n’a pas déclaré l’argent reçu de l’industrie pharmaceutique). Grassley ne s’est pas arrêté en chemin. Il a demandé des comptes à la toute-puissante Americain Psychiatric Association (APA), suite à la découverte des énormes sommes reçues et des actions détenues par son président, Alan Schatzberg, comme nous l’apprend un autre article du New York Times, en date du 12 juillet : « Psychiatric Group Faces Scrutiny Over Drug Industry Ties » (Investigation concernant les liens financiers entre l’industrie pharmaceutique et l’organisation professionnelle des psychiatres).
Ce sont des affaires de ce genre qui jettent le doute sur la psychiatrie, discipline médicale la plus corrompue par l’industrie psychiatrique, selon les données accessibles. On peut voir les sommes perçues par les psychiatres du Vermont, rendues publiques par le rapport du procureur de l’Etat de Vermont (voir le compte-rendu de Pharmacritique). Mais ce type d’affaires et de soumission financière et autre discrédite l’ensemble de la recherche médicale et mine la confiance du public, comme nous le disait Marcia Angell dans cet excellent texte que nous avons traduit dans son intégralité : « Marcia Angell dénonce la manipulation de la recherche clinique et le contrôle de l’information médicale par les firmes. »
Le nouveau code de marketing dit vouloir réduire ces rémunérations à leur « valeur réelle en fonction du marché », comme si le public avait la possibilité de vérifier ce qu’il en était… Et le New York Times de souligner que « Aucune des restrictions envisagées par l’industrie ou par des groupes professionnels n’a pour objectif de trancher complètement les liens financiers autrement plus préoccupants [que les gadgets ou les invitations au golf…] qui unissent la profession médicale et beaucoup de médecins pris individuellement à l’industrie pharmaceutique. »
« Le Congrès doit adopter une législation qui obligera les fabricants de médicaments et de dispositifs médicaux à déclarer une vaste catégorie de rémunérations offertes aux médecins dans un registre national, ce qui rendraient publics tous les conflits d’intérêts. C’est une réforme que l’industrie elle-même semble maintenant prête à accepter. Mais il y aurait encore mieux à faire : la profession médicale doit se sevrer, s’extraire presque entièrement de son rapport de dépendance écrasante de l’argent de l’industrie pharmaceutique. »
Le sénateur Charles Grassley devrait venir donner quelques cours de responsabilisation à nos vénérables élus et leur rappeler qu’on a voté pour eux pour qu’ils nous représentent et défendent nos intérêts, pas ceux des lobbies… Notre santé, pas celle financière des firmes pharmaceutiques.
Et les journalistes du New York Times auraient beaucoup de boulot à sortir les nôtres de leur inertie et de leur oubli de l’investigation, qui était jadis ce qui permettait au journalisme d’être légitime en tant que « quatrième pouvoir ». De nos jours, les media n’excellent que dans la courtisanerie et dans le panégyrique.
Last but not least, n’oublions pas que l’industrie se déclare prête à accepter une législation de transparence aux Etats-Unis, pas en France, où elle coule des jours paisibles, sans aucun compte à rendre, même en cas de catastrophe sanitaire.
A quand des lois de transparence ? A quand des lois permettant une action collective, des recours collectifs en justice? A quand des procès intentés par l’Etat aux firmes qui ne respectent pas les lois ?
Merci à Marilyn Mann pour l’article du New York Times.
Illustration : Radicarl.net
Elena Pasca
Il y a effectivement de grandes diffférences entre ce qui est prescrit par les codes de déontologie et d’éthique et ce qui est pratiqué… Les travaux de recherche en psychologie de la persuasion (Joule, Beauvois, Cialdini etc…) montrent que la valeur réelle du cadeau supposé n’influe pas sur l’induction chez les récepteurs du besoin de réciproquer- c’est à dire rendre au moins quelque chose en réponse au geste initial-; C’est la raison pour laquelle les petits cadeaux sont plus pernicieux parcequ’ils aboutissent à allouer du temps de réception aux représentants des industriels (c’est le moins que l’on puisse faire pour ne pas paraitre malpoli !) pour les laisser vous convaincre… dans le cadre de la soumission librement consentie mais malheuresement inconsciente. L’éviction des petits cadeaux, quand elle sera vraiment pratiquée, est donc une victoire à ne pas minimiser ( cf les positions de No Free Lunch ou du Formindep). Bien entendu, elle ne règle pas tout. Revenons à l’argent…L’avantage de l’argent c’est qu’il permet beaucoup plus efficacement, par la fixation d’un prix de marché accepté, d’éteindre les dettes (cf Marcela Iacub). De plus l’argent est plus facilement traçable ! Toutefois cela suppose que le prix corresponde à la valeur effective d’un travail réellement accompli, ce qui pose en réalité le vrai problème car il y a souvent fourniture de plus values indues en numéraire et en services immatériels pour un travail qui est fréquement mâché ou réalisé par d’autres (cf les publications sur le ghostwriting). La déclaration par les laboratoires des sommes versées pourrait donc améliorer la transparence. Il faut savoir qu’un watch dog institutionnel – Center for Science in the Public Interest – réalisait déjà aux USA une veille historicisée des collaborations des leaders d’opinion médicaux (www.cspinet.org) mais comme toute veille, elle ne peut répertorier que ce qui est relativement accessible…et tout ce qui se pratique ne l’est pas… Enfin, il est important de différencier conflit d’intérêt de déclaration des intérêts. Le conflit d’intérêt survient quand un acteur privilégie un intérêt de rang inférieur par rapport à un intérêt de rang supérieur quand les deux intérêts se présentent simulanément. (Lefebvre, 2006 in « Les conflits d’intérêts dans le monde des affaires, un janus à combattre » Magnier V. (Eds),Paris, PUF). Cette définition montre qu’un conflit d’intérêts est trés différent de la simple déclaration des intérêts. Un médecin peut donc avoir et déclarer des intérêts sans forcément avoir un conflit d’intérêts avéré même si il a objectivement plus de chances d’en avoir un que celui qui n’a pas d’intérêts ou que celui qui ne déclare pas ses intérêts ! Il ne faut donc pas se tromper sur l’objectif de la déclaration des intérêts qui est surtout d’être un garde fou et de permettre d’assurer la traçabilité dans l’étude documentée d’un conflit d’intérêts s’il devait advenir. Pour conclure, on ne peut bien entendu pas se satisfaire du fait que sous la pression, l’industrie semble accepter de renoncer aux petits cadeaux et serait prête à déclarer les intérêts offerts aux médecins avec qui elle collaborent. Outre que dans le petit jeu des policiers et des voleurs, la législation à un temps de retard certain sur la transgression, la tentation d’une société qui ne parvient pas à résoudre une problématique est in fine de légaliser les pratiques non éthiques sous conditions… Ains sous condition de déclaration, des pratiques de (sur) rémunération des leaders d’opinion médicaux pourraient perdurer. Nous aurons donc un comportement autorisé par une légitimité de type rationnel-légal (Max Weber) là où la légitimité au sens des autres parties prenantes n’est pas acquise. Ainsi, les pratiques de sur-légifération et de sur-normalisation par des codes et des crédo susceptibles de renforcer les pratiques éthiques est un leurre qui ne fait qu’affaiblir l’exercice pragmatique de l’éthique sur le terrain par les personnels de santé. Les USA sont effectivement en avance sur la France où il ya tant à faire. Aussi, laissons Alexis de Tocqueville conclure : » A doctrines dures, pratiques molles ». Bonne journée quand même. Sophia Emic.
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Merci beaucoup pour cette excellente intervention ! Je suis parfaitement d’accord avec ce que vous dites, à une nuance près.
Beaucoup d’aspects ont été évoqués ici ou là dans ces pages ; la difficulté quand on fait une note sur un site, c’est aussi de se limiter dans les renvois, la longueur, etc., pour que le texte ne devienne pas indigeste. J’ai déjà tendance à faire trop long, trop touffu, avec trop de parenthèses… (Je n’ignore pas mes multiples défauts et aspérités ;-))
Bref, on ne peut pas rappeler en permanence tout ce qu’on a déjà écrit, surtout lorsqu’il s’agit de rendre compte de quelque chose et non pas de faire une synthèse.
Je répons d’abord à propos des « CADEAUX », « petits » et « grands » :
Vous avez raison, et je l’ai déjà dit plus d’une fois dans ces pages : le moindre cadeau, et peu importe de quelle valeur, crée une obligation, parce qu’il n’est pas intéressé venant des firmes ; c’est un investissement appelant fortement à un retour sur investissement. Rien n’est désintéressé, tout est calculé pour maximiser le profit, et, par exemple, « l’information » n’est rien d’autre que de la publicité, toujours réécrite par le service marketing ou par les ghostwriters, évoqués dans l’éditorial du JAMA que j’ai traduit.
« Virulent éditorial du JAMA et propositions pour limiter conflits d’intérêts, ghostwriting, manipulation par les firmes »
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/05/06/editorial-du-jama-avec-des-propositions-pour-limiter-conflit.html
Les « petits » cadeaux sont les plus vicieux, parce que les médecins qui acceptent des stylos ou des post-it se disent même outrés quand quelqu’un leur suggère qu’un tel « rien du tout » serait en mesure d’influencer leurs prescriptions. Or on sait que plus un médecin se croit invulnérable, insensible à l’influence, plus il est influencé. L’influence inconsciente étant probablement la plus pernicieuse.
Je connais la littérature sur le sujet, et notamment les papiers de Dana, Loewenstein, Wazana, etc. que je cite souvent, ici ou ailleurs. Et ce n’est pas pour rien que j’ai adhéré à Healthy Skepticism, qui a la même approche, visible par exemple dans les textes de Peter Mansfield que j’ai cités.
En tant que philosophe travaillant en interdisciplinarité avec les sciences sociales, dont la psychologie sociale et la psychanalyse, je ne pourrais pas ignorer cet aspect, cette obligation créée par un tel « cadeau », qui n’est jamais qu’un cadeau, comme dit Wazana à juste titre. Ce n’est pas un don au sens où l’entendait Marcel Mauss, mais quelque chose qui entraîne une « promesse » de réponse, une obligation. Cela, c’est Nietzsche qui l’a formulé de façon très percutante.
J’apprécie donc à sa juste valeur l’initiative de No free lunch: « l’amnistie des stylos » (remplacer les stylos portant des logos par des stylos non pervertis par le marketing).
Mais je pense que le journaliste du New York Times pensait à autre chose en formulant la question de cette façon, et les exemples qu’il a pris le prouvent. Exemples que j’ai étayés et précisés justement pour essayer d’expliciter la perspective.
Je veux parler du fait que, si l’influence se fait indépendamment de la valeur d’un cadeau, il y a une différence à prendre en compte d’un autre point de vue. Et les firmes ne se sont pas trompées en investissant de plus en plus dans les leaders d’opinion (en plus des associations de patients).
Cf. le dossier du British Medical Journal, dont Pharmacritique a rendu compte ici:
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/06/20/les-medecins-leaders-d-opinion-pantins-du-commerce-pharmaceu.html
Un ponte tel Biedermann a pu faire énormément augmenter le diagnostic de trouble bipolaire chez l’enfant, ouvrant ainsi un marché potentiellement infini, et donc les prescriptions d’antipsychotiques. Or Biedermann n’a pas été payé en stylos, mais en millions. Etc.
Je veux donc dire que poser la question des sommes faramineuses qui restent « autorisées » par de code qui interdit les stylos, cela ne contredit en rien l’axiome disant que tout cadeau influence et fausse les habitudes de prescription.
Mais des stylos donnés à des généralistes auront un impact bien plus modeste que les grosses sommes données à des leaders d’opinion, qui iront parler dans des congrès et influenceront des centaines d’autres médecins en une seule fois, écriront des articles et donneront des cours à la fac, serviront d’experts à diverses instances, sociétés savantes, associations de patients et autorités sanitaires et feront des exposés lors de réunions de formation médicale continue, ce qui aura pour effet d’influencer des dizaines de milliers de médecins à la fois.
C’est cela que souligne le New York Times, et moi aussi lorsque je donne des détails dans la même perspective.
Mais peut-être faudrait-il faire une mise à jour dans le texte lui-même, soulignant ce que je viens de dire, pour qu’il n’y ait pas de confusion.
Je répondrais dans un autre commentaire sur les autres aspects. Bonne journée et @ plus!
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Vous dites : « Il faut savoir qu’un watch dog institutionnel – Center for Science in the Public Interest – réalisait déjà aux USA une veille historicisée des collaborations des leaders d’opinion médicaux (www.cspinet.org) »
Pharmacritique, qui référence et le CSPI (Center for Science in the Public Interest) et la base de données en question (Integrity in Science Database), dirigée par Merrill Goozner, en a rendu compte ici :
« Une base de données sur les conflits d’intérêts des scientifiques américains : Integrity in Science Database ».
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/08/03/une-base-de-donnees-sur-les-conflits-d-interets-des-scientif.html
Quant à la déclaration d’intérêts:
Vous dites : « Enfin, il est important de différencier conflit d’intérêt de déclaration des intérêts. Le conflit d’intérêt survient quand un acteur privilégie un intérêt de rang inférieur par rapport à un intérêt de rang supérieur quand les deux intérêts se présentent simulanément. (Lefebvre, 2006 in « Les conflits d’intérêts dans le monde des affaires, un janus à combattre » Magnier V. (Eds),Paris, PUF). Cette définition montre qu’un conflit d’intérêts est trés différent de la simple déclaration des intérêts. (…) Il ne faut donc pas se tromper sur l’objectif de la déclaration des intérêts (…) ».
Je suis parfaitement d’accord, et je pense que Pharmacritique n’a pas fait cette confusion et ne s’est pas trompé quant à la déclaration d’intérêts. Pour le voir, il suffit de lire les notes de la catégorie « Déclaration d’intérêts, la panacée ? »
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/declaration-des-conflits-d-interets-la-panacee/
Par exemple la note au titre très explicite et prenant pour référence quelqu’un qui s’y connaît très bien en la matière, pour avoir été à la fois rédacteur en chef du NEJM, professeur de médecine et auteur lui-même : « Miser sur la déclaration des conflits d’intérêts des médecins relève de la pensée magique, selon Jerome Kassirer ».
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/07/22/miser-sur-la-declaration-des-conflits-d-interets-des-medecin.html
Ainsi, c’est bien beau de demander le respect de l’article 26 – qui exige la déclaration des conflits d’intérêts lorsqu’un professionnel de santé s’exprime en public sur un médicament, pour faire court – mais cela ne change rien en pratique. On voit bien que les déclarations d’intérêts des experts de la HAS ou de l’AFSSAPS ne changent rien non plus, d’autant plus qu’elles ne sont pas vérifiées…
Pharmacritique fait sienne la position de Kassirer, et ce n’est pas pour rien que je parle comme un disque rayé de la nécessité de changer les dispositifs législatifs et juridiques permettant de réprimer les conflits d’intérêts. Je cite Kassirer, qui considère qu’on perd de vue l’essentiel en se concentrant sur la déclaration d’intérêts :
la plupart du temps, les discussions portent sur le fait que « les médecins qui dirigent les projets de recherche ne déclarent ni qui finance leurs études, ni leurs liens personnels avec les firmes dont ils testent les médicaments, les techniques ou les dispositifs. Certains disent qu’exiger d’eux qu’ils révèlent leurs intérêts financiers serait un désinfectant très efficace. Mais cela relève de la pensée magique. (…) De fait, la déclaration des liens financiers peut donner bonne conscience au scientifique ou au chercheur, mais elle n’élimine pas la possibilité d’un conflit d’intérêts. Ce qui veut dire que la déclaration peut être nécessaire, mais ne suffit pas à résoudre les relations financières complexes enfouies profondément dans les essais cliniques. »
Le reste de l’article est édifiant, lui aussi. Comme la caricature, postée dans la même catégorie, « Déclarer les conflits d’intérêts ou leur barrer la route? », etc.
Et j’ai d’ailleurs un autre article sous la main, plus ancien mais passé inaperçu, que j’ai pourvu d’une introduction trop longue… Il faut la revoir et poster le texte, mais il y a tellement de choses à faire…
Et tellement de réponses en retard aussi…
Cordialement.
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Dans un excellent livre, « petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens », l’auteur nous relate une expérience de manipulation instructive où il s’avère que le petit cadeau sans valeur « engage » plus que le gros cadeau cher.
L’explication n’est pas fournie ou je ne l’ai pas comprise mais les ressorts du subconscient sont ainsi.
Dans le même ordre d’idée les « VM » (représentant commerciaux des firmes aux cabinets médicaux) partaient du cabinet en réitérant une énième fois : « vous ne m’oubliez pas Docteur ». Cela créer un « engagement » dont on n’a pas conscience.
Après plusieurs années avec eux, me croyant à l’abri de ces diverses manipulations, je me suis aperçu que de nombreuses prescriptions tombaient du stylo et que mes ordonnances n’étaient pas toujours cohérentes, d’autant que je lisais la revue Prescrire assidument.
Simplement comme beaucoup de mes collègues médecins, j’étais tombé dans la marmite des Labos tout petit, à l’hôpital, pensant que ce système était la norme, d’autant que mes « Maitres » montraient l’exemple. A l’époque le montant des chèques allouer pour les « oeuvres » des patrons qui montaient les études d’un produit d’une firme dans un grand service se chiffraient en millions de francs. J’y ai moi-même participer comme étudiant et reçu un chèque de 7000 francs à l’époque où le francs valait pas loin d’un Euro.
J’ose espérer que ces pratiques n’ont plus cours ne doutant pas de la probité des collègues de ma génération…
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