Les incinérateurs de déchets responsables de cancers. Etude de l’Institut de veille sanitaire (résultats définitifs revus à la hausse)

Le 27 mars 2008, l’Institut de veille sanitaire (InVS) publiait sur son site un rapport auquel il n’a pas fait trop de 687cba5874301555908bbfb2561ec05e.jpgpublicité… Incidence des cancers à proximité des usines d’incinération d’ordures ménagères. Rapport d’étude et synthèse (PDF à télécharger à partir de cette page). Les résultats préliminaires de cette « étude écologique de type géographique, réalisée dans le cadre du Plan cancer 2003-2007 » avaient été publiés à l’automne 2006, suscitant une réaction immédiate du Centre national d’information indépendante sur les déchets (CNIID) intitulé Cancer : l’incinération coupable 

Les résultats qui viennent d’être publiés sont plus alarmants, même si l’Institut de veille sanitaire impute cette augmentation des taux de cancer (de la population vivant à proximité) uniquement aux incinérateurs de la vieille génération qui auraient rejeté des substances cancérogènes dans l’environnement. Le résumé indique qu’une « relation statistique significative est mise en évidence entre l’exposition aux panaches d’incinérateurs et l’incidence, chez la femme, des cancers toutes localisations réunies, du cancer du sein et des lymphomes malins non hodgkiniens. Un lien significatif est également retrouvé pour les lymphomes malins non hodgkiniens chez les deux sexes confondus et pour les myélomes multiples chez l’homme uniquement.

Cette étude ne permet pas d’établir la causalité des relations observées, mais elle apporte des éléments convaincants au faisceau d’arguments épidémiologiques qui mettent en évidence un impact des émissions des incinérateurs sur la santé. Portant sur une situation passée, ses résultats ne peuvent pas être transposés à la période actuelle. Ils confirment le bien fondé des mesures réglementaires de réduction des émissions appliquées à ces installations industrielles depuis la fin des années 1990. »

Le résumé d’une plaquette publiée le même jour et intitulée Incidence des cancers à proximité des usines d’incinération d’ordures ménagères. Exposition aux incinérateurs pendant les années 1970-1980. Résultats définitifs réitère cette distinction entre vieux incinérateurs et nouvelles installations : « Cette étude, en montrant un impact des rejets atmosphériques des incinérateurs d’ordures ménagères sur le risque de certains cancers entre 1990 et 1999, confirme l’utilité des mesures de réduction des émissions de polluants qui ont été imposées à ces installations industrielles depuis la fin des années 90. On peut dès lors s’attendre à une diminution du risque de cancer chez les populations exposées aux niveaux actuels d’émission. Toutefois, en regard de l’incertitude sur les temps de latence d’apparition des cancers, on ne peut exclure que les expositions passées depuis les années 70 puissent encore aujourd’hui favoriser la survenue de cancers. »

Les associations opposées aux incinérateurs et les centres indépendants ont parfaitement raison de souligner l’absurdité de cette tentative implicite de dédouaner les installations actuelles. Que voulez-vous, des intérêts économiques sont en jeu. Et quelques lobbies aussi, dénoncés par le CNIID. Ce n’est pas étonnant, puisque c’est un business très lucratif et que la demande ne fait qu’augmenter. On a vu en Italie, à Naples plus précisément, que même la mafia avait massivement investi dans le traitement des déchets… C’est dire que ça doit rapporter gros, puisque ces gens-là ne font pas vraiment dans la philanthropie… Alors que suggère l’InVS ? D’attendre 20 ans pour constater la nocivité des incinérateurs dernier cri ? Au lieu de prévenir et d’appliquer le principe constitutionnel de précaution en utilisant des techniques moins nocives de traitement des déchets ? Et d’appeler à la « décroissance », au moins partielle, pour réduire la quantité de déchets non biodégradables.

Mais c’est une attitude typique des autorités sanitaires françaises que de faire le constat 20 ans après les faits, après avoir nié l’existence des dangers et des victimes… C’est le syndrome Tchernobyl : circulez, il n’y a rien à voir !

Il n’y a pas encore de réaction sur le site du CNIID, mais il est toujours utile de lire les documents et articles déjà publiés, par exemple ceux expliquant les dangers de l’incinération. On comprend mieux à quel point nous sommes bernés par des écrans de fumée – c’est le cas de le dire ! – et par des euphémismes langagiers… Ainsi, « Un incinérateur de déchets ménagers, abusivement qualifié aujourd’hui d’Unité de Valorisation Energétique (UVE) par ses promoteurs, n’a pas comme but de produire de l’énergie : l’incinération est un procédé coûteux d’élimination. Par la combustion, le volume et la masse des déchets solides sont  » visuellement  » réduits. Par contre, la pollution est non seulement augmentée mais créée par le procédé lui-même, et transférée dans les résidus solides (mâchefers, REFIOM), les rejets liquides et surtout les fumées toxiques. Il est illusoire de croire que l’évolution de la législation supprime toutes les limites et les dangers inhérents au procédé même de l’incinération ». (Extrait du texte de Sébastien Lapeyre, « La dissimulation de nos déchets »).

D’autres informations de source indépendante portant sur les techniques et sur les usines d’incinération sont disponibles sur le site La France de l’incinération, à partir duquel on trouve des liens supplémentaires. 

On peut lire aussi le compte-rendu du Monde en date du 4 avril 2008, Les risques de cancer liés aux rejets des incinérateurs dans les années 70 et 80 sont réévalués à la hausse.

 

Une question s’impose: puisqu’on parle tellement de la lutte contre le cancer, priorité nationale depuis Jacques Chirac, ne serait-il pas plus raisonnable d’éliminer les substances cancérogènes connues?? Et d’étudier celles qui sont susceptibles de l’être? Quitte à froisser les industries chimique, agrochimique, agoalimentaire, pharmaceutique, automobile, nucléaire, etc. ? Bourrer l’alimentation et l’environnement en général de substances oncogènes pour satisfaire les gros intérêts économiques privés de type Monsanto, firmes pharmaceutiques et autres tout en prétendant agir contre le cancer, c’est d’une logique… euhh, toute néolibérale. « Laissez faire », dit-elle depuis Adam Smith. Et, qui sait, la fameuse « main invisible » finira peut-être par réguler ce problème aussi et  faire disparaître le cancer du marché, si je puis dire… Bah, on verra 20 à 30 ans après, et encore, si jamais les informations ne reléveront pas du secret de fabrication et/ou du secret défense…

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