Le journal The Scotsman a publié le 29 juin 2009 un article intitulé « MSPs seek answers as cervical cancer vaccine fears grow » (Des parlementaires écossais demandent des réponses alors que les inquiétudes à propos du vaccin anti papillomavirus grandissent).
Cet article fait suite à un autre, paru dans le même journal, et dont Pharmacritique a rendu compte dans cette note. Il montre que les Ecossais s’inspirent des critiques allemandes du Gardasil, formulées notamment dans le manifeste de 13 médecins et scientifiques de renom. Celui-ci a abouti à une demande officielle de révision des recommandations vaccinales, adressée au Comité technique allemand des vaccinations (STIKO), pour qu’il réévalue les données scientifiques, depuis la prévalence (très faible) du cancer du col de l’utérus en Allemagne jusqu’aux résultats (incomplets) présentés par Merck et Sanofi Pasteur MSD pour obtenir l’homologation, en passant par l’utilité et l’efficacité (douteuses) du Gardasil.
Illustration: Center for Media and Democracy
Rappelons qu’en Autriche, une telle demande de réévaluation, faite sous l’angle du coût / efficacité par l’Institut Ludwig Boltzman et dans le contexte de l’émotion publique suscitée par le décès d’une jeune fille, a abouti dès janvier 2008 au retrait du Gardasil du calendrier vaccinal et à son déremboursement.
Pharmacritique a été la toute première à rendre compte en français d’abord de la décision de l’ancienne ministre de la santé, la Dre Andrea Kdolsky de retirer le vaccin, puis des résultats concrets de la modélisation faite pour déterminer l’efficience et l’efficacité (le rapport coût / efficacité, sous l’angle médico-économique) à long terme du Gardasil. Modélisation qui devait répondre aussi à la question de l’impact d’une vaccination massive par le Gardasil sur la fréquence et la mortalité par le cancer du col de l’utérus. Impact calculé sur 50 ans, en supposant une vaccination de la majorité des filles par un vaccin efficace à 100% et ne nécessitant pas de rappel. Les résultats sont extrêmement décevants et montrent que la vaccination massive n’est qu’une énorme perte d’argent, sans efficacité. (Et tout cela sachant que la modélisation n’a pris en compte que le scénario idéal, qui n’inclut pas les effets secondaires ou l’inefficacité du moins partielle, par exemple).
Sur tous ces aspects, vous pouvez lire les nombreuses notes de Pharmacritique réunies sous les catégories « Gardasil : critiques et controverses à l’étranger ».
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Des élus écossais qui représentent l’intérêt général et s’intéressent à la santé de leurs administré(e)s… Espèce inconnue en France
Ce sont donc les autres expériences européennes qui ont poussé les élus écossais à creuser la question et à interroger le ministère de la santé et les autorités en charge des vaccinations. Ces parlementaires écossais ne font que leur travail, ils représentent l’intérêt général, eux, pas comme nos politiques accoquinés avec les laboratoires pharmaceutiques, à commencer par Nicolas Sarkozy et François Sarkozy, comme nous l’avons montré dans cette note (conflits d’intérêts et instrumentalisation des malades d’Alzheimer pour les profits des laboratoires, etc.) et dans celle-ci (Sarkozy a nommé Jean-François Dehecq, le patron de Sanofi-Aventis, président du conseil d’orientation des fonds souverains à la française : rien que 20 milliards d’euros… L’exemple parfait d’alliance politico-sanitaire, de complexe politico-médico-industriel… La même alliance qui se distingue des autres pays en commandant 94 millions de doses de vaccin contre la grippe porcine?)
Les élus écossais veulent d’abord savoir qu’est-ce qui justifie l’implémentation d’une vaccination massive par Cervarix. (En Grande-Bretagne, c’est le Cervarix du laboratoire britannique GSK qui a été préféré au Gardasil, mais il va de soi que les questions et inquiétudes concernent les deux vaccins).
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Doutes sur l’exactitude et l’indépendance des recherches menées par GSK et des informations données au public
Après sa rencontre avec l’association International Coalition of Advocates for the People (ICAP), Mary Scanlon, la porte-parole des conservateurs, a adressé quatre questions à la ministre de la Santé Shona Robinson. Elles reprennent une partie des arguments avancés par l’ICAP quant aux problèmes, lacunes et défauts de la recherche scientifique en la matière, les « données incorrectes » présentées aux parents pour obtenir leur accord ainsi que quant aux signalements d’effets secondaires graves subis par certaines jeunes filles vaccinées.
The Scotsman avait révélé peu auparavant que plus de 150 jeunes Ecossaises ont subi des effets indésirables, et ces révélations y sont pour quelque chose dans la décision des parlementaires de regarder de plus près l’ensemble du programme de vaccination et de se demander si toutes les recherches nécessaires ont été faites avant de le mettre en œuvre, et comment elles ont été faites.
Par exemple, quel était l’âge des filles inclues dans les essais cliniques par rapport à l’âge des jeunes filles qu’on vaccine en pratique ?
(On sait que les essais cliniques n’ont porté que sur des filles de plus de 15 ans. Pour les plus jeunes, et GSK et Merck / Sanofi Pasteur MSD se sont contentés de constater qu’il y avait des anticorps chez à peine quelques centaines de fillettes. Ce « détail » avait été rendu public par l’une des chercheuses qui avait travaillé pour les deux firmes : la Dre Diane Harper, qui souligne dans les interviews données à la presse que le Cervarix et le Gardasil pourraient ne pas convenir aux moins de 15 ans, sans toutefois remettre en question les vaccins.)
Une autre question des parlementaires écossais concerne les mesures prises pour s’assurer que les jeunes filles que l’on vaccine ne sont pas déjà infectées par les sérotypes de papillomavirus à haut risque contenus dans le Cervarix (HPV 16 et 18), autrement dit : y a-t-il un test de dépistage préalable permettant de savoir, en cas d’infection préalable, de quel sérotype il s’agit ?
La réponse est non, bien entendu. La question n’est pas sans raison, puisque certaines analyses menées dans un sous-groupe de jeunes filles vaccinées par le Gardasil avaient montré un risque numérique, mais statistiquement non significatif, d’augmentation du nombre de dysplasies cervicales chez les vaccinées par rapport aux non vaccinées. Ce qui ne veut encore rien dire, mais doit rester un signal d’alerte à prendre en compte, dans la mesure où ces chiffres pourraient, s’ils venaient à être confirmés dans des échantillons plus étendus et bien analysés, faire peser sur ces vaccins le soupçon de favoriser l’installation d’infections persistantes et de dysplasies de moyen et de haut grade, donc peut-être aussi d’augmenter le nombre de cancers du col de l’utérus.
Certains on déjà tiré ces conclusions-là, mais elles sont pour le moment sans fondement scientifique et ne font que traduire l’incapacité à lire les statistiques couplée à une recherche de gros titres et de sensationnalisme. Ce n’est pas ainsi que les critiques du Gardasil et du Cervarix seront prises au sérieux, et s’avancer sans fondement sur ce terrain glissant est proprement dangereux lorsque ce sont des médecins qui le font. Parce que ceux qui ne savent pas interpréter les statistiques ici, ne savent pas non plus le faire ailleurs, et nous autres, usagers, avons donc quelques raisons de nous inquiéter.
Peu de temps avant cet article, The Scotsman avait parlé de 150 jeunes Ecossaises souffrant d’effets secondaires. Les parents des jeunes filles concernées et les critiques du Cervarix en général soulignent qu’il faut aussi prendre en compte la sous-notification criante (c’est-à-dire le fait que, pour tous les médicaments et vaccins dans les pays occidentaux, maximum 5% des effets indésirables sont signalés. Le chiffre est par ailleurs consensuel).
Il semblerait que certaines erreurs soient survenues dans les documents informatifs distribués au public écossais, erreurs qui minimisent les risques d’effets secondaires et mènent à la disparition complète de certaines réactions adverses telles les douleurs articulaires. La question qui se pose est dès lors « Pourquoi le ministère de la Santé voudrait faire de la rétention d’information et ne pas dire aux médecins généralistes, aux écoles et au grand public que les risques d’effets secondaires sont en fait 10 à 100 fois plus importants que ce qui a été dit dans ces brochures ? Est-ce parce que le public prendrait cela pour un acte frauduleux, pour de la négligence ou de l’incompétente ? Et qu’il serait de toute façon en droit d’être déçu ? »
Les documents en question sont ceux utilisés aussi sur les sites officiels parlant de la vaccination, et les autorités sanitaires persistent à dire qu’aucune information erronée n’a été diffusée au public. GSK (Glaxo Smith Kline), la laboratoire pharmaceutique qui commercialise le Cervarix dit, quant à lui, que des études détaillées ont été menées et que les effets indésirables constatés sous Cervarix sont comparables à ceux constatés suite à d’autres vaccins.
Enfin, The Scotsman décrit trois cas d’effets indésirables sévères, dont le premier est celui d’une jeune fille de 13 ans, incapable d’aller à l’école car souffrant de douleurs articulaires et musculaires chroniques, de vertiges, troubles de la vision et d’une intense fatigue depuis ses trois doses de Cervarix. Elle ne peut plus sortir du lit ou faire quoi que ce soit sans l’aide de sa mère, qui a dû arrêter de travailler pour s’en occuper.
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Qu’en est-il vraiment du Cervarix?
Rappelons enfin l’excellente analyse des résultats des essais cliniques faits par GSK et sur lesquels se base l’autorisation de mise sur le marché donné au Cervarix. Autorisation donnée sur une base scientifique encore plus faible que celle du Gardasil, assène la revue allemande indépendante Arznei-Telegramm, dont l’analyse a été intégralement traduite par Pharmacritique dans cette note.
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La question rhétorique habituelle…
Que font les élus français? On a bien vu que Nicolas Sarkozy et François Sarkozy se préoccupent de la santé financière de Sanofi-Aventis, et par là même, aussi des profits de Sanofi Pasteur MSD (donc de Merck, puisque MSD veut dire Merck Sharp & Dohme). La santé individuelle et publique n’a jamais été une préoccupation des hommes politiques français. Tant qu’on les laissera faire, ce sera toujours l’effet Tchernobyl… La désinformation et toujours les mêmes pigeons plumés pour augmenter les profits privés.
Remarquez, l’Europe ne fait pas mieux, puisque le lobby pharmaceutique est gâté par la Direction générale entreprises et industrie, sous la direction du vénérable ami des firmes, Günter Verheugen, au lieu de dépendre de la Direction Santé et protection des consommateurs (voir la note de Pharmacritique rendant compte de la protestation de plusieurs fédérations associatives à propos de cette aberration qui en dit long sur ce que valent nos vies).
Et puis, comme le poisson pourrit par la tête, avec de tels exemples, comment voulez-vous que l’élu lambda se soucie d’autre chose que des profits que peuvent lui apporter les lobbies? Parlant de ces groupes de pression représentant les industriels et autres intérêts privés qui font et défont les lois publiques, notre Assemblée nationale a émis un soi-disant réglement, qui demande, par exemple, que les lobbyistes de l’Assemblée n’utilisent pas le papier portant l’en-tête de cette vénérable institution… C’est dire jusqu’où allaient les libertés de ces corrupteurs… Pharmacritique reviendra là-dessus.
A ce sujet, voir déjà les notes de la catégorie « Hommes politiques et lobbies: conflits d’intérêts« .
Elena Pasca – copyright