C’est au mois d’octobre que les recommandations européennes de prise en charge de l’hypertension artérielle seront publiées en intégralité. Cependant, ce qui se dégage déjà des travaux de l’ESH (European Society of Hypertension), réunie à Milan pour les actualiser, c’est qu’il convient de mettre un terme à la recherche forcenée d’une pression artérielle toujours plus basse, parce que des complications cardiovasculaires risquent d’apparaître, sans qu’on comprenne pourquoi. La sagesse populaire savait, elle, que le mieux est l’ennemi du bien… Du moins depuis Voltaire. Cet article du 22 juin du site The Heart nous donne les détails.
Mais c’est aussi l’occasion d’apprendre d’autres choses sur l’impact de la désinformation pratiquée par l’industrie pharmaceutique et sur les conflits d’intérêts de l’ESH et des cardiologues français. Entre les déclarations de la SFC (Société Française de Cardiologie) et la réalité…
Un extrait de l’article de The Heart:
« Il y a de plus en plus d’évidences qu’il faut abandonner le dogme « lower is better » [plus c’est bas, mieux c’est – traduction libre]. Il y a manifestement un seuil tensionnel au dessous duquel apparaît un risque coronaire (ce n’est pas le cas pour les AVC [accidents vasculaires cérébraux]), possiblement lié à une hypoperfusion [vascularisation diminuée]. Il reste difficile de savoir si les décès sont en rapport avec la baisse tensionnelle et/ou aux conditions pathologiques qui elles-mêmes peuvent engendrer la baisse tensionnelle ».
La Société française de cardiologie (SFC) a annoncé tout récemment (voir HeartWire) vouloir avancer un peu sur le chemin de la transparence, en demandant des déclarations de conflits d’intérêts aux cardiologues qui souhaitent (!!) les fournir. Pour ce qui est de la collaboration avec les laboratoires pharmaceutiques, ce n’est pas demain la veille qu’elle va s’arrêter ou qu’elle sera soumise à des impératifs de transparence, au vu de cette formulation très vague figurant dans le programme des Journées françaises de l’insuffisance cardiaque, qui auront lieu en octobre 2009 (à télécharger à partir de l’accueil du site): « Exposition pendant le congrès de firmes de produits pharmaceutiques et de matériel ». Pas un seul nom n’est donné. Transparence, en effet.
Le programme du « Printemps de la cardiologie » (à télécharger à partir de cette page), qui vient d’avoir lieu à Nancy du 11 au 13 juin, est plus bavard. Aussi lit-on à la page 16: « Le Comité Scientifique et d’Organisation du Printemps de la Cardiologie 2009 tient à remercier l’ensemble des partenaires du congrès pour leur soutien: Abbott, Actelion Pharmaceuticals, Ardix Therval Medical, AstraZeneca, Biopharma, Boehringer Ingelheim, Bouchara Recordati, Daiichi-Sankyo, Daiichi-Sankyo / Lilly, GE Healthcare Ultrasound, Genzyme, Medison, Menarini, Merck Serono, Sanofi-Aventis, Servier, Vitaphone« .
Un peu décevant, par rapport aux « Gynovations« , la petite sauterie annuelle des gynécologues et apparentés, dont l’édition de 2007 se tenait à Monte-Carlo avec le « soutien » de 42 (quarante-deux) sponsors. Les leaders d’opinion n’ont-il pas fait tout le travail dû ou qu’est-ce qui se passe? Il n’y a plus de « soutien »? La cardiologie française risque-t-elle l’effondrement, la famine? Le stress me gagne, la tension risque de faire exploser mes coronaires!
Quant à l’annonce des pauses, elle est toujours suivie de la mention « visite de l’exposition« .
Petite anecdote. A mes débuts dans le labyrinthe des conflits d’intérêts, je me demandais si on amenait les médecins présents voir une exposition artistique… S’il y a encore des usagers aussi naïfs que je l’étais à l’époque, autant dire qu’il s’agit de visiter les stands publicitaires dont fourmillent toutes les méandres de ces palais et autres halls de congrès et qui leur donnent cet aspect d’immense foire publicitaire. Il n’y a même pas besoin de visiter, d’ailleurs, puisqu’on ne peut pas y échapper, la publicité est partout: en haut, en bas, à droite, à gauche… Aux repas, dans les yeux et les mains des visiteurs médicaux et autres VRP – comme dans les têtes de tout ce beau petit monde.
Apparemment, la société européenne d’hypertension (ESH) n’est même pas encore arrivée à ce stade minimal, de vouloir déclarer les liens financiers ou autres, comme on peut le constater à travers ce que nous dit HeartWire, puisque les orateurs n’ont pas déclaré leurs conflits d’intérêts en séance plénière, donc nous n’en avons aucune idée. Peut-être se disent-ils que trop peu, ce n’est pas bon, d’accord, mais que trop, c’est trop.
Il suffit de regarder la colonne de gauche du site de l’ESH: ça pullule d’annonces de « sessions éducatives » (ce qui veut dire formation médicale continue), assurée, comme presque toujours, par des laboratoires pharmaceutiques (AstraZeneca, Bayer, Boehringer-Ingelheim… ) Et voilà qui rédige les recommandations européennes de bonne pratique…
Et lorsqu’on regarde le sondage paru sur le même site de l’ESH, on se rend compte à quel point la désinformation médicale orchestrée par les laboratoires pharmaceutiques influence les médecins… Ainsi, à la question si les résultats de l’étude ACCOMPLISH, contestée par les critiques (voir cette note), influencera la prescription des médecins quant aux prescriptions d’une combinaison d’IEC (inhibiteurs de l’enzyme de conversion) + inhibiteurs calciques plutôt que d’IEC + diurétiques thiazidiques, plus de 80% répondent oui… A se demander même s’il n’y a pas quelque chose qui se cache derrière cette annonce du relâchement de la dogme « lower is better »… On risque de devenir paranoïaque, à force d’errer dans ces eaux polluées.
Mais peut-être peut-on aund même garder un petit espoir? Peut-être verra-t-on un tout petit peu moins de médicaments et d’angoisse insufflée à ces malades auxquels des médecins demandent de mesurer leur tension deux fois par jour? Ce qui est une bonne façon de l’augmenter, soit dit en passant… Un peu de bon sens, une meilleure articulation avec mère-nature et ce qu’elle peut faire à travers le changement du mode de vie ne serait pas de trop. Si les médecins retenaient ce message-là, celui disant que l’interventionnisme à outrance est contre-productif, ici comme ailleurs, ce serait déjà une avancée. Ceux qui aimeraient ramener le cholestérol au niveau des chaussettes, et le chasser partout, y compris chez les enfants (voir la note de Pharmacritique, le compte-rendu de la controverse et cette caricature édifiante), pourraient peut-être amorcer le début d’une ombre de réflexion…
Et, toujours en passant, n’est-ce pas au cholestérol qu’on fait un « procès en sorcellerie », selon l’expression de Christian Lajoux, président du LEEM et PDG de la firme n
ationale Sanofi-Aventis, qui prétend que c’est l’industrie pharmaceutique qui en est victime?
Le gavage ou le nettoyage?
Gaver les gosses d’aliments qui pullulent de graisses, de sel et de sucres, faits de matières premières pourries par les pesticides et autres douceurs, puis les gaver de statines et autres anticholestérol tels l’Ezétrol, voilà de quoi faire monter notre tension artérielle.
Le monde médico-pharmaceutique est la cause d’une hypertension artérielle iatrogène, c’est le cas de le dire. C’est un problème de santé publique auquel il faut répondre en nettoyant les écuries, dans tous les domaines, de l’agriculture à la médecine – question de salubrité publique. Cela fera des économies à coup sûr. Ne parle-t-on pas partout de décroissance?
Illustration: Northwestern Memorial Hospital/ADAM.
Elena Pasca
Le lobby « industries pharmaceutiques » constitue parfois une menace pour la santé publique. Combien de molécules commercialisées ont dû être retirées du marché?
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etudiante en biochimie ,je sius intérressée par les informations et je souhaiterai savoir plus
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fouillis , mal présenté, illisible
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