Dans un communiqué du 19 février, l’AFSSAPS/ANSM relaie la recommandation par l’agence européenne du médicament (EMA) de suspendre l’autorisation de commercialisation du Raptiva (efalizumab), l’un de ces anticorps monoclonaux humanisés très à la mode ces temps-ci, utilisé dans le traitement du psoriasis en plaques.
Au lieu de reprendre simplement les mises en garde internationales, notre agence de sécurité sanitaire ne pourrait-elle pas – une fois n’est pas coutume – prendre son rôle au sérieux et exiger que des études sérieuses soit menées sur les effets (et effets indésirables) de classe de TOUS les anticorps monoclonaux humanisés? De préférence avant qu’il y ait d’autres décès ou réactions adverses chroniques et/ou invalidantes.
On ne paie pas notre pharmacovigilance pour qu’elle fasse uniquement de la traduction de l’anglais! (Et encore, elle ne la fait pas toujours, loin s’en faut, à en juger par la différence entre les RCP (résumés des caractéristiques du produit) français et ceux anglophones, surtout lorsqu’il s’agit de médicaments ayant eu une autorisation nationale et non européenne. Dans ces cas, notre Vidal est d’un mutisme encore plus effarant que d’habitude).
Ceux qui lisent l’espagnol trouveront plus bas un lien vers une analyse d’ensemble de la toxicité des anticorps monoclonaux qui vaut le détour.
En attendant un hypothétique changement de nos autorités sanitaires, nous devons nous-mêmes, usagers, nous interroger sur les risques de ces médicaments (voir quelques noms plus bas) par rapports à leurs bénéfices. Ceux qui sont traités par Raptiva pour un psoriasis en plaques devraient faire attention à la façon d’arrêter le traitement et aux précautions à prendre.
Illustration: National Institute of Allergy and Infectious Diseases parlant des anticorps monoclonaux (monoclonal antibodies)
Une introduction accessible aux anticorps monoclonaux peut être lue sur cette page.
Pharmacritique a repris les mises en garde de Santé Canada et détaillé les effets indésirables du Raptiva à l’aide d’autres liens, en évoquant aussi d’autres anticorps monoclonaux (Remicade° (infliximab), Humira° (adalimumab), Cimzia° (certolizumab pegol), MabThera° (rituximab), Enbrel (étanercept))… Nous avons aussi exprimé plusieurs fois des doutes quant à cette véritable mode menant à l’utilisation de plus en plus fréquente de ce type de médicaments issus de la biotechnologie (Avastin (bevacizumab), Herceptin (trastuzumab), Tysabri (natalizumab), etc.), et dont la balance bénéfices – risques n’est pas bien étudiée avant leur commercialisation. (Voir par exemple cette note ou celle-ci sur les risques et effets secondaires des inhibiteurs du tumor necrosis factor ou TNF).
Pourquoi cette ignorance? Un premier élément de réponse est la propension générale des agences du médicament à accorder des autorisations de mise sur le marché (AMM) hâtives et/ou douteuses, favorisant les intérêts commerciaux au détriment du plus élementaire principe de précaution. Parlant des anticorps monoclonaux, la tendance s’accentue sous la pression des firmes et de certaines associations de patients qu’elles financent, surtout lorsqu’il s’agit de ceux utilisés dans les cancers ou les maladies chroniques. On n’attend pas que des essais cliniques d’envergure soient menés à bien, parce que cela retarderait l’accès rapide des patients à ces molécules, dit-on. On n’attend pas non plus de voir si ces produits des firmes de biotechnologie rachetées entièrement ou partiellement à prix d’or par les laboratoires constituent ou non un progrès thérapeutique, dont on sait qu’il est très faible depuis une bonne dizaine d’années. (Rappelons-nous le constat de l’ISDB, formulé en 2001, commenté ici par Pharmacritique, qui appelle un chat un chat). Non, on croit les firmes sur parole – et on sait qu’elle ne déforment jamais, au grand jamais, la vérité!
Le prix à payer? Cela revient à faire des expérimentations sur les malades, à grande échelle, et les firmes sont gagnantes même si les médicaments finissent par être retirés, compte tenu des coûts astronomiques de ces médicaments biologiques.
Même pour un usager lambda qui creuse un peu, le caractère répétitif des effets indésirables et l’appartenance de ces médicaments – par-delà leurs spécificités – à une seule et même classe doit pousser les agences de sécurité sanitaire à évaluer globalement les anticorps monoclonaux, sans attendre que le risque augmenté de leucoencéphalopathie multifocale progressive, de troubles lymphoprolifératifs, de cancers et d’autres conséquences graves se confirme pour chacune de ces molécules prise séparément. Il faut aussi démystifier les firmes de biotechnologie, parce que l’engouement actuel risque fort de créer des aveuglements à répétition et d’encourager la spéculation et la course de vitesse au détriment de la qualité, de l' »endurance » (d’un médicament) et de la médecine fondée sur les preuves (EBM: evidence-based medicine).
Un document fort intéressant sur les effets indésirables de classe des anticorps monoclonaux
Une analyse d’ensemble des anticorps monoclonaux a été réalisée déjà en 2005 (!!) par la Fundación del Instituto Catalán de Farmacologia (FICF), qui promeut un usage rationnel des médicaments et effectue des analyses de la balance bénéfices – risques. L’article fort explicite s’appelle « Toxicidad de los fármacos biológicos en la artritis reumatoide y la psoriasis » (Toxicité des médicaments biologiques [issus de la biotechnologie] utilisés en arthrite rhumatoïde et psoriasis). Il a été publié dans le bulletin pharmacologique de la Fondation, Butlleti Groc, membre de l’ISDB (International Society of Drug Bulletins). (Le lien a été donné début janvier sur le blog Las mentiras de la industria farmaceutica. Ce n’est pas tombé dans les oreilles d’un sourd! Dommage que nos autorités sanitaires entendent moins bien qu’un usager lambda!).
A noter aussi cette analyse, certes de moindre envergure et plus limitée, parue en 2004 dans la Revue Médicale Suisse sous le titre « Effets secondaires des traitements par anticorps monoclonaux en hématologie« .
Extrait du communiqué de l’AFSSAPS/ ANSM quant à la suspension du Raptiva:
« Depuis septembre 2008, 3 cas de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP), dont deux d’évolution fatale, ont été rapportés chez des patients traités depuis plus de 3 ans (2 aux USA, un en Europe). La leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) est une infection cérébrale grave, évolutive qui peut conduire au décès ou a un handicap sévère. (…)
Au vu de l’ensemble des données disponibles, le comité des médicaments humains de l’EMEA (CHMP) a conclu que le rapport bénéfice-risque de Raptiva® est devenu défavorable. Le CHMP a considéré que les bénéfices de Raptiva® étaient modestes, que l’utilisation du produit est associée à d’autres effets indésirables sérieux et qu’il n’est pas possible à ce stade d’identifier un groupe particulier de patients pour lesquels les bénéfices dépasseraient les risques. En conséquence, l’EMA recommande à la Commission européenne de suspendre l’autorisation de mise sur le marché de Raptiva® (efaluzimab). (…) » (Le nom correct est efalizumab, pas efazulimab…)
Le communiqué de presse de l’EMEA /EMA précise que, outre la leucoencéphalopathie multifocale progressive, le Raptiva est associé à des effets indésirables tels des syndrome de Guillain-Barré, des syndrome Miller-Fisher, des encéphalites ou encéphalopathies, des méningites, des septicémies et des infections opportunistes (touchant les personnes immunodéprimées). La note précédente de Pharmacritique en a mentionné d’autres, et c’est plus ou moins la même chose qu’on trouve dans les RCP de chacun des anticorps monoclonaux. Ne faudrait-il pas au moins restreindre leur utilisation?
Attention lors de l’arrêt du traitement
Dans son alerte (réservée aux abonnés) concernant Raptiva, la revue médicale allemande Arznei-Telegramm souligne que ce médicament ne doit être arrêté que sous surveillance médicale étroite, et pas de façon abrupte, parce qu’il y a un risque d’exacerbation du psoriasis, avec apparition d’érythrodermies (éruptions cutanées érythémateuses) et de formes pustuleuses de la maladie. De plus, l’arrêt de traitement ne signifie pas un arrêt immédiat des risques d’effets indésirables, puisque les effets du Raptiva sur le système immunitaire peuvent durer jusqu’à 12 semaines. Pendant cette période, il faut être attentif à l’apparition d’éventuels symptômes neurologiques ou de signes d’infection.
Erythodermie: qu’est-ce que c’est?
Selon ce cours spécialisé, à lire en entier pour les détails, « l’érythrodermie est un syndrome rare diagnostiqué cliniquement devant la présence d’un érythème confluant associé à une desquamation touchant l’ensemble des téguments (plus de 90 p. 100 de la surface corporelle) et d’évolution prolongée. Il s’agit d’une urgence dermatologique. Elle peut s’accompagner d’un prurit féroce et d’un oedème important avec sensation de tiraillement cutané. L’atteinte des muqueuses est possible sous forme d’une chéilite, conjonctivite ou stomatite. Elle s’associe fréquemment à une altération de l’état général avec fièvre, adénopathies et parfois à des troubles hémodynamiques par déperdition hydroélectrolytique. Pour toutes ces raisons, elle nécessite le plus souvent une hospitalisation dans un service spécialisé. »
D’autres détails sur la suspension de Raptiva dans
- La mise en garde de l’agence américaine du médicament (FDA).
- Cet article de Yahoo Finances, qui nous informe entre autres que les chiffres de ventes avaient déjà commencé à chuter suite aux alertes internationales.
Les firmes concernées sont Merck et Serono pour l’Europe et Roche et Genentech pour les Etats-Unis.
Elena Pasca
copyright Pharmacritique
bonjour,
j’étais sous Raptiva depuis plus d’un an, et j’étais vraiment fort satisfaite ; c’est mon pharmacien qui m’a prévenue du retrait du médicament. Je ne revois ma dermato à l’hôpital qu’en avril, et je crains d’être mise sous anti TNF, en même temps, je ne vois pas d’autres solutions, ayant fait du psoriasis de manière vraiment invasive avant d’être prise en charge à l’hôpital. Comble de malchance, j’ai l’impression que la mer et le soleil aggravent mon psoriasis.
Je suis un peu inquiète maintenant des effets possibles du Raptiva après avoir lu cet article !
J’aimeJ’aime
RAPTIVA PENDENT UNE ANNEE ARRET ET REMISSION DU PSO[RIASIS] 45 JOURS APRES
J’aimeJ’aime
bonjour; j’ai été traité à la RAPTIVA pendant un an.j’ai réçu l’orde par telefone de mon medecin d’arreter le traitement en février 2009, et deux mois après , c’est a dire mardi de pentecotes j’ai été foudroyé par une grosse poussée de psoriasis de la poitrine aux molets ; est il normal avoir été atteint d’une aussi forte poussée ? j’aimerais bien comprendre = merci
J’aimeJ’aime
A Marques
Je suis désolée d’entendre ça.
Je n’y connais rien, mais à priori, c’est ce que l’effet rebond (dont il est question dans le titre) veut dire.
Plus loin: « Dans son alerte (réservée aux abonnés) concernant Raptiva, la revue médicale allemande Arznei-Telegramm souligne que ce médicament ne doit être arrêté que sous surveillance médicale étroite, et pas de façon abrupte, parce qu’il y a un risque d’exacerbation du psoriasis ».
Et comme l’effet du Raptiva peut durer jusqu’à 12 semaines, il est en effet possible que ce rebond arrive deux mois après.
Mais là, il n’est question que de théorie, de ce que disent les mises en garde. Vous devez aller voir votre médecin et en parler avec lui. je ne peux pas m’empêcher de trouver sa façon de faire (arrêt décrété par téléphone…) très peu professionnelle.
J’espère que cela s’apaisera vite.
Bon courage à vous et aux deux autres lecteurs!
Cordialement
J’aimeJ’aime
mon medecin en decembre 2008 m a demande d arreter brutalement raptiva et juste après j ai ete 2 mois a l hopital je suis touche a 90% je vis un enfer je souhaite me rapprocher d une association afin de prouver qu il s’agit d’une erreur medicale . ils m ont dit que l on ne pouvait pas faire d omelette sans casser des oeufs!! il a foutu ma vie en l air, aidez moi on va se rapprocher, nous sommes 1500 patients en france , on ne va pas se laisser faire
J’aimeJ’aime
Bonjour au x victimes de RAPTIVA
Rat de laboratoire pendant 1 an, l’arrêt de ce produit pharmaceutique à transformé ma vie en cauchemarde. Une action en justice est en cours contre le fabricant de ce poison. vos témoignages me sont nécessaires.
Bon courage à Julien et aux autres victimes.
Christophe BIERI 06 43 80 38 65
victime.raptiva@gmail.com
J’aimeJ’aime
le 12 08 2011
bonjour ,
ma femme était sous tysabri depuis 4 ans sans aucun probleme les irm n’avait pas bouger le neurologue nous a conseiller d’arréter le traitement pendant 6 mois. mais 2 mois apres ma femme a commencer a avoir des troubles du language, j’ai donc contacter le neurologue qui apres des erreurs de diagnostiques a contacter le professeur qui suivait ma femme au debut de sa sclerose en plaque a Lyon. le verdict ne s’est pas fait attendre rien qu’avec l’irm ils ont conclu a une l.e.m.p (leuco-encephalopatie multiphocale progressive) confirmer par les prises de sang envoyer en france et au etats unis. en ce moment ma femme est stable elle a eu 5 plasmaphereses et un traitement de corticoides et immunodepresseur .
je tiens a mettre en garde ceux qui prenne ce traitement de bien connaitre les sypmtomes de cette maladie surtout en cas d’arret du traitement car a nous on ne nous en a pas parler du tout et d’apres les effets indesirables du traitement on a cette maladie que pendant le traitement, hors ma femme l’a eu apres l’arret de ce traitement
[NdR: Nom de famille effacé par Pharmacritique, par prudence, s’agissant de données médicales personnelles]
J’aimeJ’aime
Bonjour Alain,
Merci pour votre témoignage et votre mise en garde. je suis sincèrement désolée pour votre épouse.
Deux points pour tenter de comprendre cette apparition après l’arrêt du Tysabri:
– le virus JC (John Cunningham, d’après le nom du premier malade chez lequel il a été diagnostiqué en 1971) qui déclenche la leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) peut rester latent très longtemps; on parle alors d' »infection lente ».
– l’immunosuppresion induite par le Tysabri (comme par tous les anticorps monoclonaux: Enbrel, Humira, Xolair, MabThéra, Remicade, Avastin, Herceptin…) ne s’arrête pas de suite à l’arrêt du traitement.
Le virus JC est présent à l’état latent chez 60 à 80% des adultes sains, probablement après une première infection survenue dans l’enfance, mais qui passe inaperçue, parce qu’elle n’est pas symptomatique. Ce virus ne pose aucun problème tant que le système immunitaire fonctionne correctement. mais il devient pathogène – comme d’autres virus et agents dits « opportunistes » – lorsqu’il y a une immunodépression ou immunosuppression, par exemple en cas de HIV et SIDA, en cas de chimiothérapie, etc. Et en cas d’immunosuppression par les anticorps monoclonaux, cette classe dont le Tysabri fait partie.
Toutes proportions gardées, les cas de LEMP semblent plus fréquents sous anticorps monoclonaux qu’en cas de HIV, où le pourcentage avoisine les 5%, en diminution grâce aux trithérapies antivirales.
J’ai parlé de la leucoencéphalopathie multifocale progressive plus en détails dans d’autres notes sur les divers anticorps monoclonaux, accessibles à partir de cette page:
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/avastin-enbrel-anticorps-monoclonaux-anti-tnf/
D’autres témoignages ont été postés à la suite de ces articles.
J’ai abordé le Tysabri en particulier, dans cet article: « Tysabri: cinq cas de leucoencéphalopathie (LEMP), selon Santé Canada. Rappel du verdict d’Arznei-Telegramm et de Prescrire »
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2009/02/22/sante-canada-met-a-jour-la-monographie-du-tysabri-5-cas-de-l.html
Entre-temps, d’autres cas de LEMP ont été signalés, sous Tysabri et sous MabThéra en particulier. J’en parlerai dès que possible.
Bon courage à vous et à votre épouse et toute ma solidarité!
Cordialement,
Elena Pasca
J’aimeJ’aime