Un récent article du journal News & Observer nous en dit long sur la qualité des soins dispensés par les laboratoires Novartis. On voit comment les firmes pharmaceutiques respectent le code d’éthique récemment édicté par leur syndicat états-unien (PhRMA), qui n’avait pas oublié de préciser que ses dispositions sont « volontaires »… En l’occurrence, il ne s’agit pas de cadeaux et autres à-côtés offerts aux médecins, mais de l’hospitalité (sic) offerte à tous les politiques délégués de l’Etat de Caroline du Nord participant à la convention républicaine : repas en dehors de la ville, dans un cadre bucolique avec vue sur l’eau, voyage-détente en bateau…
Rien d’extraordinaire, puisque les républicains (droite américaine) sont les alliés – et les pantins – traditionnels de l’industrie pharmaceutique.
Et puisqu’on sait que rien n’est gratuit (There’s no free lunch!), il y a fort à parier que l’intérêt financier n’est pas loin du bateau des républicains… En effet, Novartis a des projets dans cet Etat : la fabrication d’un vaccin, en plus des ventes habituelles qui ne peuvent que se porter de mieux en mieux, si les médecins et les hommes politiques sont détendus, nourris et… baladés. Nous pouvons être déjà quasiment sûrs que le vaccin en question rendra un tel service à la santé publique que les hommes politiques le rendront obligatoire.
L’article du News & Observer s’intitule N.C. GOP delegates dine out on Novartis.
La photo est tirée d’Internaute Magazine (paysage de la Côte d’Or, de quoi donner des idées à Novartis France…).
Il ne s’agit pas d’une simple anecdote qui ne nous regarderait pas. Nous subissons partout dans le monde les conséquences de cette malsaine alliance entre industrie pharmaceutique et républicains états-uniens, vu la position stratégique du marché américain et de ses autorités sanitaires, au premier plan desquelles figure la FDA (Food and Drug Administration). Il s’agit de l’agence du médicament, avec un chef nommé par les politiques et avec ses experts « exemplaires » en matière de conflits d’intérêts. Tout aussi exemplaires que les nôtres, sauf qu’aucune enquête ni investigation ne vient déranger la quiétude des experts français ni endiguer tant soit peu le flot des affaires.
Quant à nos politiques, n’en parlons même pas! Il suffit de lire les notes de la catégorie Hommes politiques & lobbies (conflits d’intérêts) et celles parlant de la Commission européenne (ici, puis ici), avec le commissaire Günter Verheugen à la Direction entreprises et industrie, qui veille à huiler au mieux les rouages de l’amitié politico-industrielle.
Quant au LEEM (syndicat pharmaceutique français) et au code de « déontologie » (rien que ça!) du syndicat européen de l’industrie pharmaceutique (EFPIA), nous avons dit ce que nous pouvons en attendre. Par exemple dans la note Le LEEM se soucie de l’éthique !! Mais surtout dans la caricature L’industrie pharmaceutique, le LEEM, l’éthique et les tiques, qui juge à leur juste valeur les efforts faits par les firmes en recherche & développement (R & D) et met la main sur une possible explication de la panne d’innovation de ces dernières décennies… Et il suffit d’un exemple concret pour illustrer l’hypocrisie de ces engagements « éthiques » de l’industrie, qui ne sont qu’un artifice de communication, que des esprits mal tournés comme le nôtre appellent aussi « poudre aux yeux »…
Blague à part, cette panne d’innovation et de progrès est bien réelle: sur les centaines de médicaments approuvés depuis une quinzaine d’années, si ce n’est plus, moins de 10 apportent une véritable avancée clinique. Il faut (re)lire l’inquiétante déclaration de l’ISDB (union de revues médicales indépendantes) sur l’absence de progrès thérapeutique.
Elena Pasca