Marketing illégal du Deroxat/Seroxat par GSK et occultation du risque suicidaire: 40 millions de dollars d’amende

Nous parlions dans la note précédente du suicide comme effet secondaire de plusieurs antidépresseurs et autres Deroxat suicide final.jpgmédicaments. Cela colle parfaitement avec l’actualité…

Le jeudi 2 octobre, la firme GSK, qui produit le Deroxat/Seroxat/Paxil (paroxétine), a accepté – suite à une action états-unienne en justice, bien sûr – de payer 40 millions de dollars pour couvrir une partie des sommes déboursées par les assureurs qui ont remboursé les prescriptions issues du marketing illégal pour les usages hors AMM (c’est-à-dire dans des indications non autorisées) du Deroxat, notamment chez les enfants et les adolescents. Ces pénalités font suite aux 60 millions de dollars payés l’année dernière aux (familles de) victimes. Même si GSK doit payer 104 millions de dollars en tout, cette somme, c’est du symbolique par rapport aux profits de la firme, ne serait-ce que ceux apportés par le Deroxat (paroxétine). N’oublions pas qu’il est commercialisé à l’échelle mondiale, mais que seuls les Etats-Unis demandent des comptes aux fabricants…

 

GSK a délibérément manipulé les essais cliniques et désinformé médecins et patients pour masquer l’inefficacité de cet antidépresseur et les risques de suicide chez les enfants et les adolescents, déjà connus depuis les essais. Ce n’est que sous la pression conjointe de la justice, des politiques et des media que l’hideuse vérité a commencé à voir le jour…

Les diverses méthodes de manipulation incluent le secret sur les données brutes de la recherche clinique, puisque les médecins investigateurs dans les essais cliniques ne communiquent que sur les données déjà interprétées en fonction des désidérata de l’industriel pharmaceutique qui les a financés. Il y a toute une série de biais qui découlent du financement industriel. Celui-ci fait que, même en l’absence de manipulations, il y a cinq fois plus de chances d’avoir un résultat favorable par rapport à un essai clinique à financement public. 

 

Les biais commencent dès la conception de l’essai et de son setting, de ses paramètres. Ainsi le biais de sélection, les biais induits par un groupe contrôle inactif, les biais dans les statistiques et l’interprétation des données tels que risque relatif vs risque absolu, différence statistiquement significative ou pas, analyse en intention de traiter, valeur du NNT (nombre de sujets à traiter pour obtenir tel résultat: number needed to treat, et ainsi de suite.

 

Un biais qui peut tout changer est le biais de publication, la publication sélective des essais cliniques. Chaque firme pharmaceutique étant propriétaire de son  médicament et des données, elle peut décider de ne même pas déclarer un essai clinique et de ne publier que les résultats qui sont favorables au médicament en question. Concernant les antidépresseurs, les critiques soulignent que si l’ensemble des essais cliniques avait été publié, on parlerait de l’inefficacité de ces médicaments, puisque les résultats sont défavorables dans la majorité des essais cliniques. Mais ce genre d’information n’apparaît que lors des procès, bien après que des nombreux antidépresseurs – dans la série des me-too: versions de la même molécule – ont obtenu une autorisation de mise sur le marché dans le traitement de la dépression et obtiennent aussi des extensions d’indication à d’autres troubles tels que l’anxiété, ou à des troubles relevant du disease mongering/invention de maladies tels que la phobie sociale, la timidité, le syndrome prémenstruel et d’autres troubles « dys ».

 

Le préfixe « dys » (comme dans les dysphories diverses et variées) est un bon marqueur du façonnage de maladies, de même que le préfixe « pré » (pré-diabète, pré-ostéoporose, pré-hypertension). Nous sommes tous en situation de pré-décès à plus ou moins long terme, donc nous relevons tous de la prévention telle que l’entend la médecine préventive devenue même prédictive, prescriptive et proscriptive au sens moralisateur du terme: une prévention purement pharmacologique. Il faudrait vider les pharmacies pour prévenir toute maladie qui pourrait nous arriver et nous tuer.

 

Des liens :

 

Et en France?

 

A-t-on entendu parler du moindre signe de reconnaissance de ces effets indésirables (suicide, idéation suicidaire, tentatives de suicide, dépendance, syndrome de sevrage et bien d’autres) ou de la moindre action symbolique de la justice contre GSK?

 

Quelle question rhétorique ! Dans notre pays pharma-tranquille, pharma-amical, ni les médecins, ni la justice, les politiques ou les media ne s’intéressent à ces broutilles… Ce n’est pas quelques suicides qui vont troubler la bonne marche des affaires et des liens financiers juteux pour les médecins, quand même ! Ni jeter un doute sur la façon dont nous laissons la voie libre à toutes les modalités de croissance économique, aussi sacrificielles et déraisonnables soient-elles.

 

Nous, usagers de France et de Navarre, sommes livrés pieds et poings liés aux laboratoires et à leurs complices parmi les médecins, auxquels nous servons de cobayes pour leur permettre de se remplir les poches. Si un médicament passe, tant mieux. Si ça casse, ben, les firmes n’ont rien à craindre, puisqu’on ne pourra jamais prouver que les dégâts sont dus aux médicaments, car rien ne nous permet d’avoir accès aux informations.

De plus, notre pharmacovigilance à nous – la vénérable AFSSAPS/ANSM, que j’appelle affectueusement agence d’(in)sécurité sanitaire – est tout ce qu’on veut sauf vigilante… Et puis, aucun journaliste ne sera là pour investiguer et on n’aura même pas le droit de faire un procès. Qui a entendu parler en France des victimes du Vioxx (le tueur en série rofécoxib de Merck) ? Ou alors d’autres « pilules miracles » du même acabit ? A moins de brandir toujours le bouclier anti-toxicité qui nous reste de Tchernobyl et qui fait que ce qui est toxique pour les autres ne l’est pas pour les Français…

 

Elle est pas belle, la vie ? (D’une firme pharmaceutique en France, j’entends…)

 

J’en parlais il y a des mois : ce qu’il faut dans notre pays, c’est un travail de salubrité publique, qui ne s’arrête pas à une déclaration de conflits d’intérêts qui n’engage que ceux qui y croient !

 

Il faut un assainissement qui doit commencer par un déballage à tous les niveaux, exigé et soutenu par une justice elle-même agissant dans un cadre législatif-juridique qui donne des droits aussi aux usagers, pas seulement aux industriels… Un déballage détaillé, pour que tout le monde prenne connaissance de l’étendue de la corruption, des conflits d’intérêts qui font des médecins des complices ; mais aussi pour que le grand public ait conscience du silence imposé aux victimes et de la double peine que tous les niveaux du système médico-pharmaceutique français leur infligent : une première peine par le médicament en question, une deuxième par le déni officiel (médecins, laboratoires, pharmacovigilance, justice, media…) et donc par l’absence de recours.

 

Disparaissez, victimes d’effets indésirables, on ne veut pas vous voir ! Si « l’élévation » dont il est question dans la caricature pouvait être effective, ce serait encore plus simple pour tous ceux qui préfèrent la politique de l’autruche – autruche aux pattes graissées, si je puis dire…

 

Elena Pasca

5 réflexions au sujet de “Marketing illégal du Deroxat/Seroxat par GSK et occultation du risque suicidaire: 40 millions de dollars d’amende”

  1. La question des antidépréseurs est délicate. Dire que la paroxetine est ineficace est faux. Dire qu’elle augmente le risque suicidaire est évident (comme tout les antidepresseurs). Crier sur tout les toits que deroxat = risque de suicide + ineficacité (comme vous le faites un peu) est dangereux, d’une part car cela majore la tendance suicidaire (en augmentant l’effet nocébo) et cela minore l’effet thérapeutique (en diminuant l’effet placebo qui, et je suis pas le seul à en etre convaicu, a un grand role dans l’efficacité des antidepresseurs). C’est bien ce que vous faites (information et critique), mais pour le coup, vous rendez pas service au gens sous deroxat qui tombent sur ce site via google.

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  2. je ne suis pas sûr que dire que la paroxétine est inefficace soit faux.
    c’est justement ce que les essais cliniques ont démontré ( la paroxétine est inefficace et en plus dangereuse) et que les firmes ont caché.

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  3. Merci à tous les deux pour ces remarques.
    Il s’agit en fait d’une chose démontrée lors des essais cliniques et occultée par la suite, comme le souligne Justin. Et ce que je dis est très spécifique, puisque je pointe du doigt l’inefficacité comme les risques suicidaires chez les enfants et les adolescents. (Et, comme je le disais dans la note précédente, que j’ai complétée par les liens qui manquaient, chez les jeunes adultes de moins de 24 ans).
    Même les baskets dans la caricature indiquent qu’il s’agit d’un ado 😉
    Je dis texto: « GSK a délibérément manipulé les essais cliniques et désinformé médecins et patients pour masquer l’inefficacité de cet antidépresseur et les risques de suicide chez les enfants et les adolescents, déjà connus depuis les essais ».
    Il me semble que la fameuse étude 329 portait justement sur le Paxil (Deroxat), non? Il faudrait que je vérifie, je n’ai pas les détails en tête.
    Effectivement, dans les liens, j’ai profité de l’occasion et parlé d’un blog de victimes du Deroxat, plein de liens, parce qu’il faut que les victimes se fassent entendre et que les usagers français sachent que ce type de médicament a des effets secondaires de toute sorte. Même au-delà des habitudes de prescription des médecins, les usagers eux-mêmes pensent aux antidépresseurs comme à des bonbons.
    On peut penser que ce sont là les deux extrêmes: la pléthore d’informations, d’une part, aucune information, d’autre part; eh bien, il faudra les confronter jusqu’à ce que nous ayons nous aussi des moyens d’information indépendants, plus équilibrés (côté usagers) et des recours en justice. Et puis j’attends le procès que fera l’Etat français à toutes ces firmes… Ce sera aux calendes grecques, si tout continue comme avant…
    Je pense – sans être médecin – que les antidépresseurs ont un effet placebo, comme tous les médicaments. Mais il me semble que, vu leurs effets secondaires, ce serait trop risqué de l’utiliser. Pour ça, il y a l’homéopathie et d’autres techniques, qui, au pire, n’ont aucun effet, mais du moins ne nuisent pas…
    Je pense franchement que les personnes qui ont vraiment besoin d’un antidépresseur ont aussi besoin d’un suivi de près, y compris pour éviter le suicide qui va de pair avec les épisodes de dépression caractérisée. A ce que j’ai compris, il peut y avoir ajout d’un tranquillisant au départ. D’autre part, ces mêmes personnes doivent aussi avoir un suivi psychothérapeutique, qui est au moins tout aussi important à mes yeux, surtout s’agissant de tendances suicidaires.
    Ce que je montre du doigt, c’est l’usage déraisonnable et sans précautions, tout comme les mensonges de la firme concernant les moins de 24 ans.
    D’autre part, Dorian, on pourrait utiliser votre objection pour museler toute information et toute critique, en disant que c’est dangereux pour les patients qui font confiance aux médicaments, aux médecins, etc.
    Par exemple, on sait tous que la confiance joue un rôle très important dans la relation de soins. Est-ce à dire que je ne dois pas dénoncer les conflits d’intérêts et la corruption de bon nombre de médecins, parce que cela nuirait à la guérison de certains patients?
    Ne dois-je pas dénoncer l’abus de Deroxat chez les ados, compte tenu des risques? Cela ne reviendrait-il pas à encourager le statu quo – prescriptions massives – sous prétexte de ne pas ébranler la confiance (injustifiée, la plupart du temps, puisque ne s’agissant pas de dépressions majeures) de quelques patients?
    Et encore une question : ne gère-t-on pas mieux quand on sait ce qu’on gère ? Savoir que ces risques existent n’aide pas plutôt les patients à les relativiser (sachant que c’est un artefact chimique) – ou alors à chercher une aide professionnelle s’ils sont en train de vivre tel effet secondaire ou d’avoir une envie soudaine de suicide ?

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  4. bonjour a tous,
    Je trouve ça extremement intéressant puisque je sort tout juste d une intoxication au deroxat et en plus j ai moin de 24 ans.
    Je ne ferai pas le detaillé de la liste pharaonique d effet secondaire que j ai pu avoir ni meme le cumul des medicaments qui m ont été prescrits sans raison (comme de la risperidone a 17 ANS, c etait il y a 3 ans pour des troubles d insomnies avec de la mepronizine. Je vs dit po le carnage. Je me suis arreté au bout deux jours car sa me provoquait des effets secondaires rares. Pour les medecin ce n etait rien il m a fallu un an pour que je sois noté comme hypersensible aux hypnotiques) et toujours avec autant d effets secondaires.
    Aucun medecin ne voulait mettre son traitement en cause donc l enfer, vs avez 19 ans alors on vs prend ou pour un fou ou pour un toxico ça m a valu enormement de soucis familiaux et scolaires et le pire c que g du trouvé moi meme la cause des effets secondaires multiples pendant que eux cherché ds mon sang et mes urine (a ce jour les analyses urinaires pour prouvé la non trace de stupefiant sont encore en cours) alors que la reponse etait ds le vidal (du reste vs pouvez voir la tete de votre medecin se decomposé qd vs lui ramené un vidal tous recent! on se demande bien pourquoi peut-etre car celui decrit un nombre impresionnant d effet secondaire, reduit a la moitié sur une notice de medicament) mais on vs croit pas encore. Il faut arreté de vs meme le traitement pour voir qd une journée tous s efface la on vs contredit plus mais on va po ds votre sens pour autant on vs fait un super mot signalant que toute les absences scolaires etaient d ordre medical. Eux gardent leur diplome et votre cheque et vs vs devez retrouvé votre dignité et reparé tout ce temps perdu…
    dsl si c un peu confus mais malgré l humour les boules sont la car j en sort tout juste et mes cours sont foutu vue la dureté de mon bac (stl microbiologie biochimie et genie biologie) sans conté qu ils m ont deja fait perdre une premiere. Je m en suis bien sorti car je n etait po depresif meme si g tout de meme frolé la mort par crise cardiaque a 10 reprises. J ai tellement un sentiment de gachis que j ai du mal a ecrire escusez moi encore.
    Conclusion sachez toujours ce qu on vs donne et j en ai fait l experience helas sur des 10aines de traitement, sinon vs aurez toujours tort. de plus pardon je recherche un mouvement ou une association sur toulouse de preference ou ailleurs pour dennoncé et trouvé des solution face à l abus medical.
    Voila je vs remercie.

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  5. Bonjour Ade,
    Eh bien, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on vous a fait expérimenter pas mal de médicaments, surtout à votre âge…
    Vous savez, on ne peut pas donner des conseils comme ça, sur internet, et je vous conseille de vous méfier en général de ce que vous pouvez lire ici ou là sur des forums. Attention surtout lorsque vous êtes à la recherche d’une association, parce qu’il y en a quelques-unes qui sont proches de mouvements sectaires et qui recrutent justement parmi les gens qiu ont eu des mauvaises expériences avec la psychiatrie et les médocs psy.
    Ce que je peux vous conseiller, c’est de vous adresser à l’association d’aide aux victimes des accidents médicamenteux (AAAVAM); de plus, il me semble qu’ils dénoncent en priorité l’abus de ce type de médicament.
    Voici leur site. Vous y trouverez certainement leur coordonnées.
    http://aaavam.blog.lemonde.fr/
    Vous pourriez peut-être trouver un psychiatre qui soit moins porté sur les médicaments ou alors un psychologue qui puisse vous suivre pendant quelque temps et vous aider à vider votre sac, parce qu’il ne doit pas être facile de s’en sortir après tous ces médicaments. Parler pourrait vous aider à surmonter plus facilement cette période, surtout si vous avez des symptômes de sevrage, puisque vous parliez d’intoxication au Deroxat, puis de rispéridone, qui est encore autre chose…
    Mais ce ne sont que des conseils de bon sens, on ne peut pas dire plus comme ça; et personne ne peut non plus vous encourager à laisser tomber un médicament ou à en prendre un. Il faut vraiment que ça se fasse de façon raisonnable, en fonction de votre état, et seuls des médecins peuvent juger si vous avez besoin d’un traitement et si oui, de quel genre de traitement.
    Peut-être que quelqu’un dans votre entourage peut vous recommander un psychiatre et/ou un psychologue?
    Je vous souhaite bon courage et tenez-nous au courant!
    Bien à vous.

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