Les Etats-Unis regorgent de « think tanks », organisations créées pour fabriquer les grandes lignes de la politique dans un certain domaine, puis pour décider de la propagande qui va avec, et ce pour le parti auquel le think tank respectif est affilié. En gros, ils dessinent les lignes de force qui seront défendues par la suite par les lobbyistes spécialisés. Comme l’Institut Montaigne en France, par exemple.
Le American Entreprise Institute est la façade pensante (sic) des multinationales américaines. On apprend que ce think tank, bien ancré à droite et financé aussi par l’industrie pharmaceutique, s’est fendu d’un amicus curiae (« Amicus brief »), à savoir d’une contribution spontanée versée au débat juridique que la Cour suprême aura à trancher bientôt pour accorder ou non la préemption dans le procès contre les laboratoires Wyeth.
(Ce qui fera jurisprudence et se généralisera à toute firme susceptible d’être attaquée en justice pour un Vioxx, un Avandia ou un autre médicament à gros effets secondaires, comme nous l’avons dit dans les autres notes de la catégorie Boucliers juridiques pour les firmes).
L’amicus curiae, dont voici le résumé, nous dit que l’application du droit de préemption aux firmes pharmaceutiques, donc l’impossibilité de leur faire un procès, améliorera grandement la sécurité publique… Cela est dit au moyen d’une argumentation digne d’un contorsioniste… Les détails sont dans la version longue. Bien entendu, c’est le rêve de toute multinationale que de faire ce qu’elle veut, sans aucune responsabilité pénale, sous prétexte que ça fait marcher l’économie et que trop de régulations étatiques, de possibilités de procès, etc. font peur aux investisseurs et entravent la croissance… La santé individuelle et publique, la déontologie, on s’en fout!
N’a-t-on pas entendu ce discours quelque part? Fermer les yeux sur tel détail pour ne pas effaroucher les firmes? Ou alors Sarkozy et le droit des affaires? Alors que les consommateurs et la justice sont déjà sinistrés en France et n’ont aucune base légale d’action… Ni individuelle ni collective, puisque le recours collectif en justice n’existe pas dans nos contrées.
Ca n’empêche pas les multinationales et autres politicards de crier à un trop plein de régulation qui étranglerait la vitalité des entreprises. Ma foi, les parachutes dorés n’ont pas été troués jusqu’ici par un trop plein de réglementations… A ma connaissance, aucun patron n’a eu à subir les effets d’un trou d’air. Quand à savoir si le coussin garni de billets est ergonomique, voire bénéfique pour les hémorroïdes, il faudra faire une enquête Ipsos, puisque Pierre Giacometti, son directeur, faisait partie des invités au Fouquet’s le soir de l’élection de Sarkozy.
L’illustration montre ce qui pourrait bien être le résultat d’un remède pharmaceutique sur la matière grise : il s’agit du cerveau de Homer Simpson, véritable tank, dont les capacités intellectuelles sont légendaires. Il ne serait pas étonnant qu’il soit à l’origine de l’idée d’étendre le droit de préemption aux questions de santé et de droit de regard de la société en matière d’activités industrielles…
Elena Pasca
Petite anecdote suisse sur les realtions multinationales-ONG :
http://bboeton.wordpress.com/2008/07/15/multinationales-et-ong-la-danse-du-ventre/
Bien cordialement.
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Merci beaucoup!
Très intéressant, votre article. Et votre blog en général, même si j’aurais quelques avis différents sur certains aspects 😉
L’engagement qui va au-delà du bavardage et de la pétition de foi dans le sens des sujets à la mode est tellement rare de nos jours…
Bravo et bonne continuation!
Cordialement.
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