L’insuline inhalée Exubera – autre médicament autorisé trop vite. Conséquences: risque de cancer du poumon, selon Pfizer

Voici une analyse de l’affaire Exubera qui va au-delà de la dépêche d’Associated Press reprise par quelques journaux 49327fab25a4912b14e1bcec09c43a17.jpgfrançais, dont Le Point en date du 10 avril 2008, qui titre L’insuline inhalée Exubera liée à des cancers du poumon, selon Pfizer. « Les laboratoires américains Pfizer et Nektar Therapeutics ont indiqué mercredi avoir observé une augmentation des cas de cancer du poumon chez des patients utilisant l’insuline inhalée Exubera. Cette révélation a donné le coup de grâce à l’anti-diabétique qui avait connu un échec commercial après sa mise sur le marché en 2006. »

Il est très curieux que Pfizer ait renoncé à Exubera en octobre 2007 et rétrocédé les droits à la firme Nektar sans dire un mot des risques et effets secondaires… Selon le communiqué du mois d’octobre, Pfizer se retire parce qu’Exubera n’est pas suffisamment rentable, compte tenu de la concurrence des autres formes d’insuline, mais insiste sur la sécurité d’emploi du médicament et sur son efficacité… La firme propose même de prolonger la disponibilité du médicament – par pure bonté d’âme, certainement… L’annonce du risque de cancer du poumon est faite six mois plus tard. Manœuvre tactique pour essayer d’échapper aux conséquences ? Ou pour ne pas couper les rentrées d’argent trop vite? On est en droit de se poser la question.

La revue allemande indépendante Arznei-Telegramm s’était montrée très sceptique dès l’introduction d’Exubera sur le marché, en 2006, en soulignant qu’il y avait dès le départ des doutes sur l’innocuité à long terme de l’insuline inhalée et un risque de cancer et/ou de fibrose pulmonaire. Un chercheur de la FDA (agence américaine du médicament) s’était interrogé en vain sur cette question avant l’homologation… Pourquoi ce risque prévisible et désormais confirmé ? Parce que l’insuline – qui est un polypeptide immunogène – « a aussi des effets stimulateurs de croissance, en plus des effets métaboliques », rappelle Arznei-Telegramm. L’insuline inhalée provoque une production accrue d’anticorps par rapport à celle injectée, par exemple. De plus, il semblerait que l’utilisation d’Exubera s’accompagne de plus d’hypoglycémies sévères la nuit et le matin, sans que ce phénomène puisse être expliqué.

 

Arznei-Telegramm s’interrogeait aussi sur les risques pour les personnes ayant déjà des capacités respiratoires réduites ou alors sur l’effet de la réduction de la capacité pulmonaire sur les patients cardiaques, qui auront une oxygénation encore plus réduite du fait de ces effets secondaires. D’autre part, tout trouble respiratoire risquait de modifier le taux d’absorption de l’insuline inhalée.

 

Et pourtant, « Malgré les doutes fondés sur le risque de cancer suite à une exposition chronique des tissus pulmonaires à l’insuline, Exubera a eu l’autorisation de mise sur le marché sans attendre qu’il y ait des données suffisantes sur la sécurité d’emploi à long terme ». L’éternel problème : une autorisation trop rapide, sans essais à long terme, sans études suffisantes, prend la population pour cobaye… D’autant plus que Pfizer avait fait un immense tam tam médiatique autour d’Exubera, censé améliorer le service médical rendu (SMR) et la qualité de vie des malades… Alors là, c’est sûr qu’un cancer du poumon les change de l’ordinaire, à défaut d’améliorer quoi que ce soit…

 

Les firmes pharmaceutiques paient pour que le dossier d’un nouveau médicament soit examiné rapidement par les agences du médicament et insistent pour que le délai soit raccourci et que l’autorisation ne dépende pas des résultats d’études de longue durée, comme nous l’avons rappelé en parlant des médicaments anticholestérol. Le prétexte invoqué est de nature … philanthropique : il ne faut pas priver les patients d’un médicament dernier cri déjà disponible… On voit encore et encore ce que donne cette hâte. La complaisance servile des autorités d’(in)sécurité sanitaire (Afssaps et HAS en France) montre bien que c’est celui qui finance qui décide… Le principe de précaution reste lettre morte ; et certains cobayes grossissent les rangs des victimes de l’industrie pharmaceutique et des autorités sanitaires qui leur déplient le tapis rouge.

 

Arznei-Telegramm a répercuté les nouvelles données dans une lettre d’information en date du 10 avril. La revue déplore le fait que, malgré les risques désormais connus, à peu près 4.000 patients continueront à être traités par Exubera dans le cadre d’essais cliniques et de programmes prolongés de transition d’une forme d’insuline à une autre. On imagine qu’il ne faut pas fermer le robinet financier tout de suite… D’autant plus qu’Exubera coûte 5 fois plus que l’insuline injectable… C’est un argument de poids…

Mais « Les nouvelles données devraient mettre fin au développement de toute autre insuline inhalée. Les firmes Eli Lilly et Novo Nordisk ont déjà arrêté leurs programmes. » La firme Nektar, qui a co-développé Exubera avec Pfizer a annoncé ne plus investir dans ce médicament et ne plus chercher de partenaires pour d’autres tentatives de commercialisation.

Mais toutes les firmes ne réagissent pas de la même façon. Ainsi MannKind (MNKD), qui produit une autre forme d’insuline inhalée – Technosphere° Insulin, actuellement en essais cliniques de phase III -, s’est immédiatement fendue d’un communiqué déclarant que leur produit est tout ce qu’il y a de plus sûr et que les études n’ont mis en évidence aucun risque pulmonaire, aucun risque carcinogène en général… Cependant, la valeur de l’action de MNKD a immédiatement chuté de 60%. Un article du New York Times donne des détails sur Technosphere° Insulin et sur les incroyables espoirs que plusieurs firmes ont mis dans ce type de produits. Le titre en dit long : Betting an Estate on Inhaled Insulin (à peu près « parier une fortune sur l’insuline inhalée »)…

Et voici l’appréciation de la revue Prescrire 2006 ; 26 (275) : 565-566 : Insuline humaine pour inhalation : Exubera et Pas de bénéfice à court terme, trop d’inconnues à long terme.
La revue Prescrire est moins précise et plus réservée, mais rappelle tout de même que la question des effets indésirables à long terme reste sans réponse.

Cependant, Prescrire nous apprend que Pfizer comptait bien se servir du fait que le dispositif d’administration d’Exubera demande « apprentissage et rigueur ». Et ceux qui suivent l’actualité médicale savent que les diabétiques ont été parmi les premiers malades à être instrumentalisés pour que les firmes fidélisent les patients à travers des « programmes d’accompagnement », appelés aussi « programmes d’observance »… Là encore, la motivation invoquée est « philanthropique » : apprendre aux patients c
omment bien prendre leurs médicaments, y compris en leur envoyant des infirmiers ou d’autres personnels à domicile… Rien que ça… Rentrer jusque dans l’intimité pour mieux influencer les patients et les fidéliser à une marque, en excluant le médecin de ce rapport désormais direct entre l’industrie pharmaceutique et les malades. On voit que le développement de nouveaux médicaments ayant des spécificités qui nécessitent un apprentissage a aussi une dimension opportuniste, puisqu’il ouvre la voie à des programmes dits d’observance qui répondent au besoin des firmes d’adapter leurs stratégies marketing, y compris en jouant la carte de l’influence directe, de la proximité avec la personne. Proximité moyennant finances, proximité payée par les malades eux-mêmes, puisque son prix est inclus dans le prix astronomique de ce type de médicaments

Exubera avait donc tout pour plaire au monde industriel… Et Prescrire de rappeler que la firme Pfizer a « organisé des programmes éducationnels à l’intention des professionnels de santé et des patients (1). La firme déclare même avoir retardé le lancement de son insuline inhalée aux États-Unis d’Amérique pour se donner le temps de mettre en œuvre ces programmes (2). Mais si les grandes firmes prennent l’habitude de ces programmes, il s’agit surtout de moyens de “fidélisation” et de “conversion” des patients jusque-là traités autrement. Et 1,3 milliard de dollars payés par la firme Pfizer à Sanofi Aventis pour la reprise de sa part des droits mondiaux pour le développement, la production et la commercialisation d’Exubera°, cela laisse imaginer une exigence de retour rapide sur investissement (3). »

Pfizer doit se mordre les doigts d’avoir payé autant. C’est le destin de toute « bulle » purement spéculative, sans fondement scientifique: elle finit bien par éclater un jour. Comme Ezétrol et Inegy, pour prendre d’autres exemples récents de purs phénomènes marketing.

4 réflexions au sujet de “L’insuline inhalée Exubera – autre médicament autorisé trop vite. Conséquences: risque de cancer du poumon, selon Pfizer”

  1. Дабе немного отвлечься, предлагаю высказывать мнение за чертой о предыдущем пользователе.
    Например:
    —(делаем такую черту)
    Позитивная запись, ещё бы немного длиннее и в самый раз. (это текст)
    Идею взял с ЖЖ ) Надеюсь поддержите!

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  2. je suis diabetique type 1 de pluis 25 ans l’insuline me rend la vie difficile maintenant j’ai 40 ans j’aimerai bien que exebura sera commercialisé ds le monde entier et ke tout diabetique se soigne avec et merci ou qu’il ya d’autre recherche sur un autre produit ke l’insuline

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  3. Я не уверен, что я понял вашу точку, может быть, Вы могли бы быть более четким. Спасибо
    sretna nova godina…
    [traduction approximative du russe par Pharmacritique: « Je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous voulez dire. Pourriez-vous être plus précis? Merci » Et plus loin: « Bonne année! » en croate et bosniaque.
    MGFRANC, j’espère que vous ne vous êtes pas trompé de site, à vouloir écrire en russe et en croate ;)) ]

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